Page:Routhier - Les échos, 1882.djvu/179

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

191
stella maris

Attendant le pêcheur qui lui tend son filet.
Kervilo jeta l’ancre, et la pêche fut bonne ;
Jamais il n’avait pris autant de beaux poissons.
Joyeux il regardait ce présent de l’automne,
Comme l’homme des champs contemple sa moisson.
Et pendant ce temps-lit, tout fier de sa richesse,
Il n’apercevait pas, s’élevant du couchant,
Comme un drapeau funèbre annonçant la détresse,
Un immense nuage à l’aspect menaçant.

L’enfant jouait, causait, et ses éclats de rire
Prolongeaient sur les flots leur timbre de cristal.
Ces fraîches voix d’enfant sont des cordes de lyre
Qu’un souffle fait vibrer comme un fil de métal.
Tout l’amusait ; parfois, elle essayait de prendre
Dans ses petites mains les poissons frétillants,
Leur parlait vivement de sa voix la plus tendre,
Et leur disait des mots naïfs et pétillants.
Ce caquet enfantin était une musique ;
Les parents l’écoutaient avec ravissement ;
Et pendant ce temps-là le nuage tragique
Montait, montait toujours, couvrant le firmament.