Page:Routhier - Les échos, 1882.djvu/245

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

262
échos domestiques


Cet hémicycle immense aux tons éblouissants,
Dont les pieds se posaient légèrement sur l’herbe,
Fascina mes regards, et je voulus courir
Admirer de plus près ces gouttes lumineuses,
Où brillaient le rubis, l’onix et le saphir,
Et qui, comme un collier de pierres précieuses,
S’égrainaient au versant de la colline en fleurs.

Je parvins à l’endroit où l’arc touchait la plaine ;
Mais il n’étaif plus là ; ses brillantes couleurs
Avaient fui devant moi. Je repris donc haleine,
Et je recommençai ma course à travers champs,
Ébloui, fasciné, plein de naïve ivresse,
Croyant toujours atteindre au collier de brillants.
Mais l’arc-en-ciel trompeur fuyait, fuyait sans cesse,
Et je revins brisé de fatigue et d’ennui.

Bien des jours sont passés depuis cette heure folle.
Or suis-je devenu bien plus sage aujourd’hui ?
Hélas ! je n’oserais en donner ma parole.
Que d’arcs-en-ciel fuyants j’ai vu depuis vingt ans
Dorer de leurs rayons l’horizon de ma vie !
Et que de fois j’ai cru dans mes rêves ardents
Que ma soif de bonheur en serait assouvie !
Pour contempler de près leur trompeuse beauté
Et leur faux diamants, que de courses j’ai faites !
Pétri d’illusion et de naïveté,