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que circulaire qui remonte à vingt ans, (23 octobre, 1871), et qui contient un éloquent appel aux Canadiens, signé par tous nos évêques, y compris l’archevêque actuel de Saint-Boniface.

Après avoir déploré en termes émus la tendance de nos compatriotes à déserter le foyer domestique et la terre natale pour aller demander à la prospérité de nos voisins un bien-être qu’il semble pourtant possible de trouver ici, nos évêques prient le clergé de s’efforcer de les retenir dans les différentes provinces de la confédération, et ils ajoutent :

« Notre jeune pays n’est pas renfermé dans des limites assez étroites pour qu’il soit nécessaire de l’abandonner. Plus que jamais, d’immenses étendues de terrain s’offrent à notre population dans les limites mêmes de la patrie. L’acquisition du Nord-Ouest, la création de la province de Manitoba offrent un avantage réel à ceux qui n’aiment pas le défrichement des terrains boisés et qui pourtant voudraient s’éloigner de la paroisse qu’ils habitent. Il n’est pas nécessaire de passer la frontière canadienne pour trouver les riches prairies de l’Ouest.

« Par cette émigration d’un genre nouveau, nos compatriotes ne se sépareront pas de nous ; ils resteront Canadiens, soumis à nos institutions religieuses et civiles, dans un milieu où leur foi ne sera pas exposée, où, au contraire, ils aideront à faire luire ce divin flambeau au milieu des vastes déserts de l’Ouest, qui n’ont été découverts par nos pères que dans une pensée toute de foi. »

Hélas ! Cet appel national, où percent des vues prophétiques, est malheureusement resté sans écho ; et Manitoba, qui aurait pu devenir une province française, est aujourd’hui une province d’où le français est proscrit !

Nous croyons que, dans cette lettre collective, c’est notre archevêque qui tenait la plume, et nous l’en félicitons. En même temps, il nous fait plaisir d’y trouver la preuve qu’on a calomnié Mgr . l’archevêque de Saint-Boniface, quand on l’a représenté comme opposé à l’émigration vers l’Ouest. En 1871, il n’y avait encore qu’une espérance lointaine de la construction du chemin de fer du Pacifique, que plusieurs regardaient même comme un rêve impossible, et cependant, (on le voit par cette circulaire), Mgr . Taché travaillait dès lors à attirer nos compatriotes au Manitoba.

Si l’espace réservé à ce travail n’était pas limité, nous pourrions