Page:Roux - La Question agraire en Italie, 1910.djvu/153

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loin de décroître, n’ont fait que se multiplier depuis l’application de la loi de 1888. En outre, les usages publics sont maintenant définis, déterminés et limités à certains terrains, et ceci est une grave modification, car ils étaient jadis essentiellement vagues et leur étendue variait avec le nombre des habitants ; c’étaient des moyens d’existence très élastiques. Les indemnités en argent ou en terrains sont calculées d’après l’étendue de l’usage tel qu’il s’exerce au moment de franchissement, en fonction, par conséquent, de la population. En supposant que les terres attribuées aux usagers soient aujourd’hui suffisantes, elles peuvent ne plus l’être demain quand la population aura augmenté : c’est ce dont se rendent très bien compte les paysans. De là des réclamations qui seront encore plus nombreuses et plus âpres dans l’avenir puisque « la loi a sacrifié l’intérêt des générations futures ». En réalité, la loi a surtout oublié que l’exploitation extensive du sol exige bien moins une appropriation parfaite qu’une superficie considérable, et qu’à vouloir réduire cette superficie, on risque de condamner les gens à mourir de faim. Le législateur a oublié que la propriété se constitue en vue du travail et que vouloir modifier le droit de propriété sans que le mode de travail se soit transformé, c’est faire œuvre vaine.

Les défauts de la loi ont été encore aggravés par l’application qui en a été très défectueuse, de l’avis du ministre lui-même[1]. Les autorités

  1. Ibid.