Page:Roux - La Question agraire en Italie, 1910.djvu/80

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d’enfants courbés sur le sol et suivis du caporal qui, appuyé sur un bâton, dont je ne jurerais pas qu’il ne fasse jamais usage, surveille le travail, presse et gourmande les ouvriers. Cependant cette surveillance est ici indispensable et ceux mêmes qui ont réussi à supprimer le caporal sur leurs fermes sont obligés de mettre leurs équipes sous les ordres d’un contremaître ; or, il est certain que le caporal jouit d’une autorité beaucoup plus considérable parce qu’il détient absolument les moyens d’existence de ses ouvriers. L’Italie est le pays rêvé des courtiers, des accapareurs de toutes sortes parce que rares sont ceux qui ont l’initiative entreprenante et l’aptitude aux affaires ; le même phénomène constaté sur le marché commercial s’observe aussi sur le marché du travail, parce que les travailleurs en général manquent d’initiative, sont apathiques et imprévoyants et que les patrons n’ont aucune idée de leurs devoirs. Aussi beaucoup de gens, tout en blâmant certains procédés des caporaux, reconnaissent-ils qu’ils sont des intermédiaires utiles et indispensables ; d’autres affirment qu’ils rendent service aux ouvriers en leur procurant du travail et, en effet, ceux-ci semblent prendre leur parti de l’exploitation dont ils sont parfois victimes et restent en général fidèles au caporal.

Celui-ci a d’ailleurs des moyens très efficaces de s’assurer la fidélité des ouvriers qu’il engage : il leur fait des avances pendant leur séjour dans la montagne ; il en fait aussi à la famille pendant le séjour des hommes dans l’Agro romano, de sorte qu’à la fin de la campagne le malheureux