s’approprieront-ils l’administration d’un territoire qui n’est pas à eux ? Se faire usurpateurs ? Beau titre et beau début pour des champions de la fraternité !
Si les hôtes du Moresnet-Neutre parlent le nouvel idiome, il faudra bien qu’à l’imitation des commerçants du lieu les autorités parlent aussi cet idiome. Leur conversion à l’espérantisme se fera insensiblement. Tout d’abord les administrations de l’État n’emploieront que la langue écrite, et de même que sur les magasins, sur les bureaux de change, sur les banques, sur les agences de transport, sur les hôtels, sur les restaurants, sur les cafés s’étaleront des enseignes en Esperanto, de même que ces maisons de commerce, imitant celles de Boulogne, de Genève, de Cambridge, feront distribuer des prospectus en Esperanto, de même sur les murs des salles du gouvernement, de la mairie, de la poste, du marché, de l’école, etc., seront affichés en Esperanto les dispositifs, les règlements, les lois, en un mot tous les textes officiels, et les journaux insèreront en Esperanto toutes les communications de nature administrative.
Mais déjà sera venu le tour de la langue parlée, puisque la langue écrite aura fourni à chacun la quantité suffisante de règles et de mots. Au guichet du fonctionnaire comme au guichet du négociant, les affaires se parleront dans la nouvelle langue, ce sera le début de l’État espérantiste. Songez d’ailleurs que le Moresnet-Neutre est un simple village où, à l’exemple de villes d’eaux, l’élément indigène le cédèra à l’élément étranger. L’élément indigène le cédèra à l’élément étranger plus vite encore que dans les villes d’eaux. En effet, il n’y sera pas intremittent comme dans celles-ci, il y sera constant, continuel, perpétuel ; il absorbera presque à lui seul tous les services de l’État, et trois mois suffiront pour que, après les fonctionnaires, le pouvoir légis-
