pour être salué par ses contemporains ou par la postérité du titre de génie, de révélateur, de prophète. Ainsi l’Allemagne, à côté de ces fameux chefs d’école, en a produit quelques autres non moins remarquables. Pourquoi sont-ils restés moins célèbres ? C’est peut-être seulement parce qu’ils ont repoussé, combattu toutes les étrangetés de ces novateurs de l’esprit qui, ne pouvant expliquer le système des choses, en inventent un autre à leur fantaisie et écrivent dessous : voilà la loi de l’être. Parmi ces écrivains secondaires de l’Allemagne, je dois citer Jacobi, Krause, Fries et beaucoup d’autres qui se sont déclarés les champions de la philosophie du bon sens, et je vous ferai remarquer, mesdames, qu’il ne faut pas confondre le bon sens avec le sens commun. Ce dernier est souvent un produit de l’éducation, des circonstances, des influences de famille, de milieu social, de nation ; souvent les préjugés l’obscurcissent ; l’instinct si puissant de l’exemple, de l’imitation, de l’habitude l’obstruent ; le bon sens, au contraire, est cette virtualité immanente dans l’âme humaine qui la rend capable de discerner le vrai, qui la fait céder à l’évidence des raisons et des faits, c’est enfin cette droite raison, logos intérieur, véritable lumière qui éclaire tout homme venant en ce monde. Herbart, l’un des derniers venus de cette pléiade de philosophes dont l’Allemagne se fait gloire, a eu le bon esprit au moins de sentir les défauts de tous ses devanciers, de reconnaître qu’avant lui on avait fait fausse route et d’avouer que tout était à recommen-
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