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leurs impulsions sur ce fluide sont rendues très-fortes. »

Après avoir donné le détail de toutes les parties qui composent l’aile, & qui concourent à exécuter le vol, voyons comment il est produit, comment il s’entretient, comment il varie, & comment il cesse.

Tous les oiseaux ne commencent pas leur vol, ou plutôt tous ne s’élancent pas dans les airs de la même manière. Les uns s’élèvent tout droit de terre, dans l’endroit où ils étoient posés ; d’autres sont obligés de prendre leur course auparavant ; d’autres enfin cherchent des hauteurs d’où ils s’élancent : mais tous suivent à peu près le même méchanisme pour le départ. Tant qu’ils sont en repos, leurs ailes demeurent fermées & appliquées sur leur flanc : veulent-ils commencer leur vol ? d’abord ils se baissent vers la terre en pliant les cuisses, & s’élèvent par un premier saut ; ils étendent ensuite les ailes de façon qu’elles forment un plan horizontal parallèle à la terre ; enfin, élevant les deux ailes en même tems, & les abaissant tout à coup, ils frappent l’air avec violence. Cette première vibration étant très-vive & très-prompte, l’air contenu entre l’aile de l’oiseau & la terre, & subitement comprimé, n’a pas le tems de s’échapper latéralement ; il réagit alors avec autant de force qu’il a été pressé ; son élasticité naturelle lui fait repousser en haut ces mêmes ailes qui l’avoient frappé : cette réaction soulève le corps de l’oiseau ; c’est le premier instant du vol. Le second & les suivans sont produits par le même jeu ; l’oiseau continuant de frapper l’air de ses ailes, & l’air comprimé de nouveau continuant de se rétablir en repoussant le corps entier. L’extension, l’élévation & l’abaissement de l’aile sont dûs aux deux muscles, dont nous avons donné la description plus haut ; & quelque pesant que soit le corps par lui-même, la force de ces muscles est plus que suffisante pour le mouvoir, puisque, suivant Borelli, ils sont dix mille fois plus forts qu’il ne faut pour produire cet effet.

L’observation de Galilée, de Borelli & de Camper, sur le creux des principaux os des oiseaux, jette encore un très-grand jour sur le méchanisme du vol & sur cette force extraordinaire des ailes. Le corps de l’oiseau se dilate en se remplissant d’air, & devient beaucoup plus léger ; il est exactement alors dans l’air ce que le poisson est dans l’eau, quand sa vessie se dilate. Cet air passe dans tous les os creux des bras, des cuisses, de la poitrine, & les rend plus légers ; ce qui fait que ces ailes acquièrent une pesanteur spécifique bien moindre. Ainsi la réunion de la force étonnante des muscles & de la légéreté du corps, donne l’explication du vol : le même mouvement qui l’a produit l’entretient.

Si la vîtesse avec laquelle l’oiseau frappe l’air de ses ailes, égale précisément la vîtesse avec laquelle l’air frappé cède en lui résistant, alors l’oiseau se soutiendra en l’air sans monter ni descendre : en effet, il ne s’est élevé la première fois, que parce que l’air renfermé entre l’aile & la terre, ne pouvant céder, a réagi contre le corps entier, &