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son nerf optique qui lui est particulier. Les dissections anatomiques qu’en a fait Leeuwenhoeck, le prouvent jusqu’à la démonstration ; le nombre de ces facettes est de plusieurs mille. La nature, qui a voulu que ces yeux fussent fixes & immobiles sur la tête des abeilles, les a dédommagées par le nombre & la position, de l’avantage qu’ont les yeux qui peuvent se mouvoir pour appercevoir les objets. Malgré ces milliers d’yeux dont ces deux orbites sont composés, elles ont encore trois yeux lisses, placés triangulairement sur la partie de la tête la plus élevée & la plus en arrière ; ce sont ceux-là qui apperçoivent les objets perpendiculairement élevés, qui échapperoient à ceux qui sont de côté.

Les expériences de Hooke ne permettent pas de douter que ces yeux ne soient véritablement les organes de la vue ; puisqu’après avoir coupé à ces mouches leurs yeux à facettes, elle se sont conduites en aveugles après cette opération. M. de Réaumur a fait pour le même objet des expériences moins cruelles que celles de Hooke, & aussi démonstratives : il a enduit d’un vernis opaque les yeux à réseaux de plusieurs abeilles ; lorsqu’il les sortit du poudrier où elles étoient avec d’autres dont les yeux n’étoient point enduits, les unes voloient de tous côtés, & les autres ne voloient point du tout : celles, au contraire, qui n’avoient point de couches de vernis sur les yeux, allèrent droit à la ruche d’où on les avoit sorties ; il jeta en l’air quelques-unes de celles qui avoient un enduit sur les yeux à facettes ; elles s’élevèrent à perte de vue & disparurent. Celles qui n’avoient qu’une couche de vernis sur les yeux lisses, voloient sur les plantes sans trop s’éloigner, & ne s’élevoient point verticalement.

Il reste entre les deux orbites ovales, ou les deux yeux à réseaux, un espace assez considérable, au milieu duquel s’élève une petite éminence, qui laisse entr’elle & chaque œil, une petite cavité d’où sortent les deux antennes, qui ont chacune douze articulations ; elles peuvent se plier à-peu-près vers le milieu, & former un angle plus ou moins ouvert. La partie inférieure de la tête qui vient en avant, est terminée par deux dents placées l’une à droite, & l’autre à gauche ; quand elles sont dans l’inaction, elles se touchent & ressemblent parfaitement à une pince ; elles excèdent les bords d’une lèvre crustacée, garnie de poils, qui termine le devant de la tête. L’abeille emploie ses dents à divers usages, selon ses besoins ; elle s’en sert pour déchirer les anthères ou capsules des étamines des fleurs, pour broyer les matières qu’elle veut avaler ; dans la construction des alvéoles, elles font l’office de ratissoir ou de rabot pour polir les édifices.

La bouche, qui est une cavité recouverte par la partie supérieure de la trompe lorsqu’elle est repliée, est au-dessous des dents : pour la découvrir & connoître sa vraie position, il faut tirer la trompe en avant autant qu’elle peut l’être, la ramener en bas, sans trop la forcer, & l’assujettir avec le doigt contre le corselet : si on regarde alors de face la partie supérieure de la trompe qui est au-dessous des dents, on voit une ouverture plus considérable