Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1782, tome 2.djvu/111

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

tout : aussitôt que la fleur sera tombée, la plante étant sur pied, aussitôt que le grain sera noué & bien formé, écrasez-le sous vos dents, & vous y trouverez le même principe sucré que dans la germination, & la partie farineuse qui doit l’absorber dans la suite, & se le combiner, ne sera pas encore formée, de manière que le principe sucré reste, pour ainsi dire, à nu dans la balle. Au mot Fermentation, on verra comment agit le principe sucré pour la produire.

Il faut conclure, d’après ces points de faits, que ce grain, à demi-formé, est très-susceptible de fermenter, sur-tout, lorsqu’il a resté long-tems exposé à la rosée dont il s’est approprié une partie considérable, & combien il est dangereux de fermer l’avoine & de l’amonceler avant sa complète dessiccation.

C’est une erreur, & une erreur malheureusement trop généralement accréditée, de penser que l’avoine, une fois rangée dans le grenier, n’exige plus aucun soin. Pour prouver cet abus, prenons deux exemples dans des climats bien opposés ; dans ceux de Flandre, de Normandie, de l’île de France, &c. il pleut beaucoup, & il y règne une humidité continuelle, au moins pendant six mois de l’année, & elle pénètre dans les greniers. Plus un corps est poreux & sec, plus il attire l’humidité, la conserve, & c’est le cas de l’avoine ; mais si les murs du bâtiment sont construits avec du plâtre, suivant l’usage presque général de plusieurs provinces, l’humidité sera bien plus forte, parce que le plâtre travaille toujours. Prenez, par exemple, une livre de plâtre en poudre, & supposons qu’il faille demi-livre d’eau pour le gâcher ; la masse totale sera à peu de chose près d’une livre & demie, lorsqu’il aura été gâché & qu’il se sera cristallisé ; donnez-lui le tems de perdre l’eau surabondante à sa cristallisation, supposons pendant un mois d’été ; prenez ensuite cette masse, pesez-la exactement, tenez-la suspendue dans un grenier, & pesez-la de 15 en 15 jours pendant un an ou deux, & vous verrez que son poids sera augmenté ou diminué, en raison de l’humidité actuelle de l’atmosphère. Or, si cette masse qui représente des murs construits en plâtre, attire l’humidité, ces murs doivent donc la communiquer au monceau d’avoine qu’ils touchent, & l’avoine l’attirer puissamment. Ce n’est pas encore le seul défaut du plâtre ; il forme du nitre sur la superficie, soit intérieure, soit extérieure des murs, & chacun sait combien ce nitre attire puissamment l’humidité de l’air, puisqu’il y tombe en déliquescence, ou bien, il se cristallise de nouveau, si un courant d’air sec fait évaporer l’eau surabondante à sa cristallisation.

Pour obvier à ces inconvéniens, un propriétaire attentif fera garnir les murs avec des planches, ainsi que le sol sur lequel repose le monceau d’avoine.

Sur une étendue de près de quatre cent lieues, la mer baigne nos côtes, & il s’élève, de tems à autre, des vents qui entraînent une si grande humidité, que tous les bois des portes, des fenêtres, &c. s’enflent de manière qu’on ne peut plus les ouvrir ni les fermer ; l’eau ruisselle sur les murs intérieurs des bâtimens,