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faire sentir. La chaleur étant passée, on le remet au pâturage pour le reste du jour. Le bœuf qui est mis à l’engrais en hiver, exige d’être tenu chaudement dans l’étable, depuis le 15 Novembre jusqu’au mois de Mai ; de manger beaucoup de foin mêlé avec de la paille d’orge, de lui faire avaler des pilules faites avec de la farine de seigle, d’orge ou d’avoine, paîtrie avec de l’eau tiède & du sel ; de lui hacher de tems en tems de grosses raves, des carottes, des navets, des feuilles & des graines de maïs, & de lui donner du vin dans de l’eau chaude, contenant beaucoup de son. Dans le pays Messin, on engraisse les bœufs avec des tourtes de chenevis & du suif ; en Auvergne & dans le Limousin, avec du foin de haut-pré & du marc d’huile d’olive, mêlé avec de gros navets & de la farine de seigle. Si les bœufs que l’on veut engraisser n’ont point d’appétit, il faut laver leur langue avec du fort vinaigre & du sel, & leur jeter même une poignée de sel dans la bouche. Rien d’ailleurs ne les entretient mieux en appétit, qu’en mettant tous les jours du sel parmi leurs alimens. Un peu d’exercice contribue aussi à rendre leur chair meilleure. C’est pour cette raison, que les bœufs d’Auvergne & du Limousin, sont inférieurs dans le pays, pour le goût, à ceux que l’on amène de ces provinces à Paris, & à petites journées. Le voyage perfectionne leur engrais.


Section V.

De la durée de sa vie.

Le bœuf, après avoir parfaitement enduré toute sa vie le joug de l’esclavage & de la tyrannie, meurt ordinairement à l’âge de quatorze ou quinze ans. Rien n’est perdu dans lui après sa mort : tout, jusqu’aux cornes, aux nerfs, aux cartilages, à la peau, est mis en usage.


CHAPITRE VI.

De la Rumination.


Section première.

Qu’entend-on par Rumination ? & quel est le nombre des estomacs du Bœuf ?

Nous appelons rumination, la trituration qu’exercent les dents molaires de l’une & de l’autre mâchoire, sur les alimens transportés de la panse & du bonnet dans la bouche.

Le cheval mange nuit & jour lentement, mais presque continuellement, tandis que le bœuf, au contraire, mange vite, & prend en peu de tems toute la nourriture qu’il lui faut ; après quoi il cesse de manger, & se couche pour ruminer. D’où vient cette différence, si ce n’est celle de la conformation dans l’estomac de ces animaux ? Le bœuf a quatre estomacs. Le premier, c’est-à-dire, celui auquel l’œsophage aboutit, est le plus grand de tous. Nous l’appelons la panse, l’herbier ou la double. Le second, qui n’est, à dire vrai, qu’une continuation du premier, porte le nom de réseau, de bonnet ou chaperon. Le troisième, bien distingué des deux premiers, & qui n’y communique que par un orifice assez étroit, est nommé le feuillet, ou myre-feuillet,