Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1782, tome 2.djvu/707

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blit à la vérité, sur-tout aux extrémités, mais qui ne se détruit pas totalement ? Lorsque cela arrive, il en est du végétal comme de l’animal ; il faut qu’il gèle, & qu’il périsse ; car toute plante, dans son état actif ou de végétation comme dans son état passif, si elle vient à geler, est morte au dégel.

M. Hunter, dans une suite d’expériences faites dans le courant de Mars & d’Avril, a trouvé des variations singulières : elles furent faites sur un noyer dans toute sa vigueur, & il s’assura de sa chaleur interne par le moyen d’un thermomètre très-sensible, qu’il introduisit à douze pouces de profondeur vers le centre de l’arbre. Dans trois expériences faites à six heures du matin, l’arbre se trouva d’un degré & demi plus froid que l’atmosphère ; dans les expériences faites dans la soirée des 4, 5, 7, & 9 Avril, l’arbre se trouva plus chaud que l’atmosphère, quelquefois même de plus de cinq à six degrés. Le même auteur répéta ses expériences dans le tems où l’arbre passe de l’état actif à l’état passif, c’est-à-dire, de l’état de végétation à l’état de repos. Dans quatorze expériences faites en Octobre & en Novembre, à différentes heures du jour, & sur des arbres de différentes espèces, l’intérieur de l’arbre se trouva toujours de quelques degrés plus chaud que l’atmosphère.

C’est sans doute en raison de cette chaleur naturelle, & de l’acte même de la végétation, que les arbres peuvent supporter jusqu’à trente & trente-six degrés de froid, comme nous l’avons vu plus haut, sans qu’ils se gèlent ; mais tous les sucs qui circulent dans un arbre peuvent se geler & se gèlent effectivement hors de l’arbre, quand la température est à zéro ou à 1 degré de froid. Comment donc se peut-il que tous ces sucs, tant qu’ils séjournent dans leurs canaux naturels, conservent la fluidité dans ces grands froids ? N’est-ce que l’effet de l’acte de la végétation même insensible qui a lieu alors ? ou bien la sève se trouve-t-elle renfermée de telle manière dans l’arbre, que la congélation ne puisse se propager, comme on s’en est apperçu pour l’eau enfermée hermétiquement dans des vaisseaux globulaires ? Et quelle différence y a-t-il entre la position de ces sucs dans l’arbre vivant & dans l’arbre mort, qui suivent exactement la température de l’atmosphère & sont susceptibles de ses mêmes degrés de froid ? Toutes ces questions sont très-difficiles à résoudre, pour ne pas dire insolubles. (Voyez le mot Végétation)


§. II. Causes extérieures de la chaleur végétale.

Examinons, avec M. de Buffon, toutes les causes extérieures qui concourent à cette chaleur naturelle au végétal. Ayant observé sur un grand nombre d’arbres coupés dans un tems froid, que leur intérieur étoit très-sensiblement chaud, & que cette chaleur duroit plusieurs minutes après leur abattage, il craignit d’abord qu’elle ne fût produite par le mouvement violent de la coignée, ou le frottement brusque & réitéré de la scie ; il s’assura du contraire en faisant fendre ce bois avec des coins ; car il le trouva chaud à deux ou trois pieds de distance de l’endroit où avoient été placés les coins. Tant que l’arbre est jeune, & qu’il se porte bien, cette chaleur naturelle n’est que de quelques degrés au-dessus de celle de