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de cette espèce de chenille, que la femelle du papillon dépose & arrange en forme de spirale, quelquefois au nombre de deux ou trois cents. Ils passent ainsi l’hiver, sans que le froid fasse mourir le germe qu’ils contiennent. Quand les arbres sont à notre portée, on peut s’amuser à les chercher, pour les détruire : mais comment les voir sur des arbres très-élevés ?

Au retour du printemps, tous ces œufs éclosent ; il en sort des chenilles qui vivent en société pendant leur enfance : elles filent ensemble une toile qui leur sert de tente, sous laquelle elles ont soin de faire entrer quelques feuilles pour se nourrir. Dès que la provision est finie, la famille se transporte à un autre endroit de l’arbre, où elle peut trouver d’autres provisions : là elle s’établit, en formant avec sa toile une tente qui enveloppe les feuilles qui sont à sa portée. Dès que la provision est finie, elle déloge. Ce petit manège, qui dure tout le temps que les chenilles sont jeunes, suffit pour dépouiller un arbre entièrement, quand il y a deux ou trois de ces familles qui sont assez nombreuses. À mesure qu’elles prennent leur accroissement, elles se dispersent de côté & d’autre. Si on ne connoît point la ruse ni l’industrie de ces insectes, on croit, en voyant tous les jours de nouveaux nids, que ce sont d’autres familles qu’on n’avoit pas apperçues : souvent c’est la même, qui voyage de côté & d’autre, à mesure qu’elle consomme les provisions des lieux qu’elle habite.


Article IV.

Chenille Processionnaire.


La chenille processionnaire, ou évolutionnaire, est de la classe de celles qui ont seize jambes. Elle est de grandeur médiocre : sa couleur est un brun presque noir au-dessus du dos, blanchâtre sur les côtés & sous le ventre. Elle est couverte de poils très-blancs, & si longs, qu’ils egalent presque la longueur de leur corps : ils s’élèvent perpendiculairement jusqu’à très-peu de distance de leur bout, qui se termine en crochet, dont la pointe est dirigée en arrière.

Cette espèce de chenille multiplie prodigieusement : chaque couvée compose une famille de sept à huit cents individus, qui ne se séparent jamais, tant qu’ils vivent sous la forme de chenilles. Ces insectes changent de peau, & subissent leur métamorphose en chrysalide, dans le même nid où ils ont vécu en société. Dès que les papillons sont sortis de leur fourreau, ils se dispersent de côté & d’autre pour s’accoupler & pondre, afin de donner naissance à de nouvelles familles. Tant que ces espèces de chenilles sont jeunes, elles n’ont point d’établissement fixe ; les différentes familles vont tantôt dans un endroit, tantôt dans un autre, sur le même arbre où elles sont nées : elles filent ensemble pour former des nids qui leur servent d’asyle. À mesure qu’elles changent de peau, elles quittent leur ancien établissement, pour aller en former un autre ailleurs. Quand elles sont parvenues au terme de leur accroissement, qui n’est point éloigné de celui de leur métamorphose en chrysalide, l’habitation qu’elles choisissent alors est fixe ; elles y subissent leur métamorphose, & n’en sortent plus que sous la forme de papillons.

Les nids propres à contenir des