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on amoncèlera les faisceaux, & on les disposera en meule, comme le blé, c’est-à-dire, que le côté des semences sera en dedans, & qu’aura soin de mettre un rang de paille entre chaque faisceau. Si le sol du gerbier, (précaution indispensable) est plus élevé que le terrein qui l’avoisine, & forme un monticule, on préviendra les suites funestes de l’humidité & des pluies. Le gerbier sera recouvert avec de la paille, afin que l'humidité ne puisse pas pénétrer dans l’intérieur, autrement le gerbier s’échaufferoit, fermenteroit, & la pourriture ne tarderoit pas à se manifester.

Si la plante reste dans le champ, on préparera au pied de la meule, avant de la défaire, un espace de terrein battu & égalisé ; en un mot, on le rendra semblable à celui où l’on bat le blé.

Les graines se vannent comme le blé, ou bien on les nettoie aux moyens de cribles faits exprès, dont il y a de deux sortes ; les uns à trous ronds, par où parlent les grains & la poussière, & les autres à trous longs, où passent la poussière & les débris des siliques. Règles générales, plus la graine est propre & nette, moins elle attire l’humidité ; moins elle attire l’humidité, moins elle fermente ; moins elle fermente, plus l’huile est douce, & mieux elle se conserve dépouillée de mauvais goût.

VIII. Des moyens de conserver la graine. Dès qu’elle sera battue, propre & nette, on la mettra dans des sacs, & on les portera au grenier. Je conseille d’étendre une toile quelconque sur son plancher, parce que les planches ou les carreaux joignent ordinairement fort mal, & qu’il y auroit une perte évidente de grains, attendu leur petitesse. Quelque peu de paille étendue sur toute la longueur de la sorte, faciliteroit l’exsiccation de la graine. Elle ne doit pas être amoncelée, & on la remuera souvent pendant les premiers jours. La toile indiquée en facilite les moyens.

Les fenêtres du grenier seront exactement fermées pendant les jours de pluie ou de brouillard ; en un mot, on empêchera qu’elles attirent le moins d’humidité possible, afin qu’elles sèchent promptement. Si on néglige ces précautions, une moisissure blanchâtre s’établira sur les graines, elles se colleront les unes contre les autres, par paquets de dix à vingt, & si on n’y remédie sur le champ, tout est gâté. L’huile que l’on en retirera perdra en qualité, suivant le plus ou le moins de fermentation & de moisissure que la graine aura éprouvée.

Ceux qui désirent vendre leur récolte en nature, se hâteront, parce qu’elle diminue beaucoup, & pour le poids & pour le volume ; ceux qui voudront la faire moudre, éviteront le temps des fortes gelées, ils y perdroient.

La masse restante après l’extraction de l’huile, vulgairement nommée trouille, ou pain de trouille, forme une nourriture d’hiver assez bonne pour les bestiaux.

On voit par ce qui vient d’être dit sur la culture du colza, que cette récolte ne nuit point à celle des blés ; & qu’au contraire elle devient un bénéfice réel & surnuméraire pour les provinces où l’on est dans la fatale habitude de laisser les terres en jachère pendant une année. Le colza se replante en octobre, c’est-à-dire, dans la même année que la terre a