Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 3.djvu/35

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tharides, & autant d’euphorbe, incorporées dans trois onces d’onguent de laurier : ce remède est-il sans effet, on doit alors pratiquer dans différens endroits de la tumeur, de profondes scarifications, & appliquer de nouveau les vésicatoires, en ayant soin de les faire entrer dans les incisions, & augmenter l’action de l’onguent, en présentant à la partie une pelle chauffée au point de rougir. L’escarre étant tombée, on panse l’ulcère avec le digestif animé avec l’eau-de-vie camphrée, jusqu’à parfaite guérison.

Le charbon de la seconde espèce, c’est-à-dire, le charbon pestilentiel, s’annonce par le dégoût, la perte d’appétit, le tremblement, l’abattement des forces musculaires, la fièvre, & par une chaleur assez manifeste aux oreilles, aux cornes, au front, aux extrémités, qui précède l’éruption, & qui persiste quelquefois après l’éruption. D’autre fois, cette chaleur ne se manifeste que dans l’endroit où la tumeur doit se montrer, par l’inflammation de la membrane pituitaire, si la tumeur doit se former sur la mâchoire antérieure ; par la chaleur interne de la bouche, si, au contraire, elle établit son siége sous la ganache ; en un mot, la seule partie du corps qui se montre le plus chaude, est en général & toujours le siége de la tumeur. Elle est dans peu si fortement engorgée, tendue & tuméfiée par l’abord & l’affluence de l’humeur, que tout passage est interdit au sang & aux esprits, de manière que la mortification s’empare promptement de la partie, ce qui arrive quelquefois au bout de vingt-quatre heures. Quoi qu’il en soit, toutes ces variations, tous ces changemens, tous ces efforts doivent être regardés comme des mouvemens & des ressources que la nature emploie pour se débarrasser de l’ennemi qui l’opprime ; mais souvent trop foible, elle ne peut triompher de la surcharge, & cette foiblesse indique alors au vétérinaire la marche qu’il a à tenir, pour seconder son action & ses vues.

Dès l’apparition de la tumeur, il faut procéder sur le champ à l’amputation : c’est le vrai moyen d’enlever la matière morbifique, & de ne se point mettre dans le cas de voir disparoître le charbon, comme nous l’avons vu arriver assez souvent, pour se montrer sur d’autres parties du corps, tant internes qu’externes ; la suppuration qui se forme alors est louable, & produit très-rarement la destruction des parties voisines. L’amputation faite, on doit toucher les taches, qui sont des taches de gangrène, au moyen du cautère actuel, autrement dit le feu ; laisser séjourner le fer chaud sur la partie, jusqu’à ce que les particules ignées aient atteint les parties vives ; panser ensuite l’ulcère avec un onguent antiputride de deux onces de stirax, de deux drachmes essence de térébenthine, & d’une drachme de quinquina en poudre. Ce traitement extérieur étant fait, on passe au traitement interne. Celui-ci est dicté par l’état des parties extérieures : ainsi, la tumeur tend-elle à suppurer, ou l’ulcère suppure-t-il, les breuvages d’une once de thériaque, de demi-livre de décoction d’oseille, & de demi-once de camphre dissous dans l’eau-de-vie ou l’esprit-de-vin, suffisent pour entretenir la détermination de la matière du centre à la circonférence. La suppuration est-elle imparfaite, le pus est-il sanguinolent :