Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 3.djvu/644

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on pense différemment : il y produit les effets les plus pittoresques par l’art avec lequel on le place ; mais qu’importe à l’agriculture que son coup-d’œil soit triste ou gai ? Vaut-il mieux avoir une longue suite de rochers nus & pelés, que des arbres en pyramide, épars çà & là, & dont le bois est si précieux & presqu’incorrruptible ? Parce que les anciens plaçoient les cyprès autour des tombeaux, des grands mausolées, on a conclu que l’arbre étoit triste, & qu’ils le regardoient comme tel. Si l’on considère sans prévention le bon effet qu’il produit près des édifices, combien il y groupe artistement, combien même il fait ressortir l’architecture, on conviendra que les anciens connoissoient mieux que nous l’effet de la perspective. Celui qui multipliera dans nos provinces du midi, le cyprès des candiots, en deviendra le bienfaiteur. Chaque jour on abat le peu de bois qui reste sur pied ; on ne replante point, & les troupeaux mangent toutes les renaissances. Bientôt ces provinces seront dans la plus affreuse disette du bois.


Cyprès (petit) ou Santoline ou Garde-robe ou Auronne-femelle. (Pl. 18, p. 615) M. Tournefort le place dans la troisième section de la treizième classe, qui comprend les fleurs à fleuron, dont les semences sont sans aigrettes, & il l’appelle Santolina foliis teretibus. M. von Linné la nomme santolina chamæ-cyparissus, & la classe dans la singénésie polygamie égale.

Fleur. Fleurons hermaphrodites dans le disque & à la circonférence, en forme d’entonnoir. Ils sont rassemblés dans une enveloppe commune B, composée d’un seul rang de folioles longues, étroites, garnies d’une écaille C à leur base. D représente un fleuron plus gros que de grandeur naturelle.

Fruit. Semences E, solitaires, oblongues, placées dans le calice sur un réceptacle plane, couvert de lames concaves.

Feuilles, simples, étroites, à quatre côtés, ressemblant à celles du cyprès par leur forme, & non par leur couleur.

Racine A, ligneuse, rameuse.

Lieu. Très-commun dans les provinces méridionales de France ; il y fleurit.

Propriétés. Plante âcre, amère, d’une odeur forte, stomachique, vermifuge, diurétique. Les feuilles échauffent beaucoup, font souvent mourir les vers lombricaux, cucurbitains & ascarides. Elles sont indiquées pour les pâles couleurs, pour les fleurs blanches sans disposition inflammatoire, & avec foiblesse des forces vitales ; dans l’ictère essentiel, exempt de spasmes, dans le météorisme sans penchant vers l’inflammation. Elles excitent la sueur, lorsque le corps y est disposé ; souvent elles constipent & donnent des coliques aux enfans.

Usage. On donne les feuilles sèches, depuis une demi-drachme jusqu’à une once, en infusion dans six onces d’eau. La décoction est de demi-once pour les animaux sur une pinte de fluide.

On avoit appelé cette plante garde-robe, parce qu’on lui supposoit d’empêcher les teignes de ronger les étoffes de laine. Du savon produiroit un effet plus sûr ; j’en ai la preuve.