Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 3.djvu/67

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rendre en même temps la marche de la charrue plus aisée, dans certains cantons de l’Angleterre on est dans l’usage d’adapter au talon du sep deux roulettes très-basses, sur l’essieu desquelles il est porté, ou une seule qu’on place au milieu du sep dans une mortoise pratiquée à cet effet, où elle est fixée par un axe qui traverse l’épaisseur latérale du sep. Le mouvement progressif de rotation de ces roulettes, quand la charrue est tirée, rend la marche du sep dans le sillon très-aisée, parce qu’il n’a plus que des frottemens latéraux à éprouver, qui sont bien moins considérables qu’ils ne le seroient sans le secours des roulettes. C’est de la marche aisée de la charrue, que dépend l’égalité du labour, qui constitue une bonne culture. Quand une charrue va avec aisance, l’attelage fatigue fort peu, il n’est point nécessaire qu’il soit aussi nombreux comme quand elle va difficilement & que sa marche est pénible. Le conducteur alors est absolument maître de sa charrue, il la gouverne à sa volonté, sans presque se fatiguer ni se gêner. Je suis persuadé que dans les terres extrêmement fortes & tenaces, on tireroit un grand avantage des deux roulettes adaptées au talon du sep : outre qu’elles faciliteroient sa marche, elles le conserveroient en lui épargnant les frottemens continuels qui l’usent peu à peu. Ces roulettes sont très-basses, leur diamètre est d’environ cinq à six pouces, ce qui n’élève le sep que de trois pouces au-dessus du terrein, à l’endroit où elles sont placées : elles contribuent encore à donner plus d’entrure au soc, parce que le talon du sep étant élevé, la pointe du soc pique plus avant.

L’âge ou la flèche est exactement le régulateur de la charrue : sa marche uniforme, l’entrure du soc dans le sillon dépendent de sa position sur la sellette de l’avant-train. Si cette pièce étoit toujours beaucoup en arrière, que le bout seul portât sur la sellette ; quoi qu’elle fût fort longue son poids ne seroit pas un fardeau considérable pour l’attelage : mais souvent on est obligé de l’avancer sur la sellette, quand on veut que la charrue pique moins ; alors son poids devient une charge pour les chevaux de traits. Si elle étoit faite d’un bois dur & pesant, comme elle a souvent huit à dix pieds de longueur, sur cinq à six pouces d’équarrissage, les chevaux auroient beaucoup de peine à tirer la charrue : il faut par conséquent choisir un bois léger, afin de ne point faire de ce régulateur un poids énorme qui fatigueroit considérablement les animaux qui sont à l’attelage. Le hêtre, le frêne, le tilleul, sont des bois très-propres pour l’âge ou la flèche des charrues, à plus forte raison pour le joug que portent les bœufs.

La forme de la flèche n’est pas absolument indifférente : dans la plupart des charrues elle est droite d’un bout à l’autre ; alors s’il y a plusieurs coutres, les derniers doivent être plus longs que les premiers, afin qu’ils puissent arriver sur la terre pour la fendre. Cette longueur des derniers coutres, n’est point du tout favorable à leur action ; ils ne sont point aussi solidement dans la mortoise où on les place, & l’effort qu’ils font pour ouvrir la terre leur fait souvent perdre la position qu’ils doivent avoir : d’ailleurs le point d’appui se trouvant trop éloigné de la résistance,