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EAU, Physique, Économie. De toutes les substances qui sont sorties des mains du Créateur, une des plus précieuses est sans contredit l’eau. Agent presqu’universel, elle concourt à la production, à l’entretien, à la réparation de presque toutes les substances qui composent les différens ordres de la nature. Les végétaux lui doivent leur développement, leur accroissement & leur vie ; les minéraux ne se seroient point formés dans le sein de la terre, si l’eau ne dissolvoit, ne charioit avec elle, & ne réunissoit les principes qui les composent, en leur fournissant le gluten qui les fait adhérer ensemble. L’homme même & tous les animaux languiroient & verroient bientôt terminer une malheureuse vie, si l’eau n’élaboroit leurs alimens, ne donnoit la fluidité aux humeurs qui circulent dans leur corps, & ne raffraîchissoit continuellement l’air qu’ils respirent. Sous quelque aspect qu’on considère cet élément, son utilité universelle mérite bien qu’on l’étudie, & qu’on connoisse toutes ses propriétés pour qu’on puisse en retirer tout l’avantage possible.


Tableau du travail sur l’article Eau.


Section première. Sa définition, sa Nature & son Histoire naturelle.
Section II. Ses Qualités physiques.
Sect. III. Son Action sur le règne animal & végétal.
Sect. IV. Eaux minérales.
Sect. V. Analyse des Eaux minérales.
Sect. VI. Moyens d’imiter les principales.


Section première.

Définition de l’Eau, sa Nature & son Histoire naturelle.


§. I. Définition de l’eau. L’eau élémentaire est un fluide pesant, transparent, sans couleur, sans odeur, sans saveur, visible, sensible, & qui jouit de la propriété particulière de mouiller les corps qu’elle touche, c’est-à-dire, d’adhérer à leur surface, & d’en pénétrer le plus grand nombre plus ou moins vite. D’après cette définition, on voit facilement qu’elle ne peut convenir qu’à l’eau élémentaire, & que l’on suppose absolument dépouillée de toutes substances hétérogènes ; mais rencontre-t-on une telle eau dans la nature ? Non. Son extrême tendance à se combiner avec tous les corps, son pouvoir énergique de dissoudre ou diviser insensiblement tout ce qu’elle touche, font qu’elle est toujours souillée d’une infinité de matières solides ou volatiles qui altèrent sa pureté. L’art seul peut l’amener presqu’au degré de pureté que nous lui supposons : des distillations, des précipitations, des filtrations répétées la dégagent plus ou moins des substances étrangères avec lesquelles elle étoit combinée.

§. II. Nature de l’eau. Quelle est la nature de l’eau considérée comme élémentaire, & abstraction faite de tous les corps, qui communément sont mêlés avec elle ? Il faut avouer de bonne foi que les recherches des physiciens ne les ont pas encore conduits à cette connoissance parfaite :