Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 4.djvu/714

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

profonds souterrains, creusés naturellement, ou par la main des hommes, ont toujours trouvé que la chaleur y étoit de dix degrés & un quart du thermomètre de Réaumur, à moins que quelques circonstances purement locales n’y fassent augmenter le degré de chaleur : or, il est bien démontré que cette chaleur de dix à onze degrés, n’est pas capable de réduire l’eau souterraine en vapeurs.

Dans le second système, aucune supposition difficile à admettre, & les difficultés sont nulles, ou presque nulles. La masse du globe est composée, comme on le sait, du moins jusqu’à une certaine profondeur, de différentes couches, & l’on peut même dire qu’excepté les masses de granit & d’autres roches de même nature, toutes les substances terreuses sont disposées par couches. Cette vérité est très-sensible : si l’on jette les yeux sur une montagne, sur un ravin très-profondément creusé, l’on apperçoit facilement ces différentes couches. Tantôt elles sont parallèles à l’horizon, tantôt elles lui sont inclinées suivant différens degrés ; on les voit quelquefois descendre avec la montagne, traverser le vallon & se relever avec la colline voisine, en décrivant ainsi une courbe ou un siphon renversé. Ces couches sont de nature différente de la terre végétale, de pierres, du sable, de l’argile, &c. &c. Parmi ces couches, les unes sont perméables à l’eau, comme celles de terre, de sable, de graviers, de pierres de nature poreuse, &c. ; les autres, comme celles de pierres dures & d’argile, ne se laissent pas pénétrer par l’eau ; elle coule par-dessus, ou par filet ou par nappe, jusqu’à ce qu’elle arrive à l’extrémité de la couche, à la surface de la terre d’où elle sort, sous forme de source ou de fontaine.

D’où vient cette eau si abondante, qu’elle donne naissance, non-seulement aux sources & aux ruisseaux, mais encore à ces fleuves immenses qui, traversant une partie du globe, se précipitent du haut des montagnes & roulent leurs flots majestueux jusqu’à la mer ? Cette quantité d’eau si considérable est fournie par l’évaporation continuelle des fleuves eux-mêmes, des lacs, des étangs, des mers, &c. ; en un mot, de tous les amas d’eau. La chaleur de la surface de la terre, celle de l’atmosphère, l’action du soleil, des vents, &c, élèvent une quantité d’eau très-considérable dans le haut des airs, d’où elle retombe sous forme de pluie, de neige, de brouillards, de rosée. Cette eau pénètre les couches de la terre, & étant naturellement fluide, elle cherche toujours à descendre, s’insinue dans les intervalles que ces couches laissent entr’elles, jusqu’à ce qu’elle rencontre une couche d’argile. Alors, comme elle ne peut pas la traverser, elle s’arrête & coule sur cette couche suivant son degré d’inclinaison. Sa force augmentant en raison du degré de vitesse qu’elle acquiert, & de sa masse qui s’est augmentée, elle se fait jour dans les endroits de la montagne, de la colline, de la plaine même où elle trouve moins de résistance, pour former des ruisseaux qui, devenant plus considérables par leur réunion avec d’autres ruisseaux, donnent naissance aux grands fleuves. La portion d’eau qui s’est arrêtée à la surface de la terre, ou qui n’a pénétré qu’à une certaine profondeur, sert à nourrir les arbres