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le même temps que de deux livres.

Comme il est difficile de rassembler une aussi grande quantité de brebis, comme sur le Lazart, on ne peut pas également par-tout s’occuper de la fabrication en grand des fromages. Chacun doit donc se régler sur le nombre de ses brebis, & les brebis sur l’étendue & la quantité de pâturages.

Le lait de chèvres, de brebis s’allie singulièrement bien avec celui de vaches, & il l’enrichit. Cependant il vaut mieux, lorsque le besoin ne l’exige pas, ne mêler que le lait de chèvres & de brebis. La quantité de lait que donnent les brebis varie suivant la saison & sur-tout relativement au pâturage. On peut en général compter sur une demi-pinte de lait par jour par chaque bête.

Il faut traire ces animaux matin & soir, & prendre garde que leurs crotins ne tombent dans le pot au lait, ce qui arrive souvent jusqu’à ce que l’animal ne contracte l’habitude de se laisser traire. Si le nombre des brebis est suffisant, on peut tous les jours faire un fromage, sinon on doit conserver le lait de la veille, & le mêler avec celui tiré du matin suivant.

On échauffe une partie du lait qu’on mêle avec l’autre, afin que la masse soit tiède ; alors on ajoute la présure : il en faut un cinquième de plus que pour le lait de vache. Le vaisseau bien recouvert, on attend que le lait soit caillé. Avec une écumoire on lève ce caillé, & on le met dans des formes de bois & encore mieux de terre vernissée, percées de trous soit dans le fond soit sur les côtés, & on laisse écouler le petit lait.

Dans cet état il est très-bon à manger quelques heures après ; on peut y ajouter du sucre ou du sel, suivant le goût des particuliers. D’autres vident de ces petits fromages dans un grand plat, y ajoutent un peu de crème, du sucre rapé & un peu d’eau de fleur d’orange, & font fouetter le tout avec des verges. Cette préparation est très-agréable.

Si on veut garder le fromage sortant de la forme, on le porte dans les caves dont nous avons parlé, & on le place sur de la paille. On le sale ensuite, le matin d’un côté, & le soir de l’autre ; enfin on le retourne chaque jour, & on a soin de ratisser la croûte mousseuse qui se forme autour. Lorsque ces petits fromages ont pris une certaine consistance, on les enveloppe avec des feuilles d’orties qu’on renouvelle plus ou moins souvent suivant la saison, mais qu’on ne laisse jamais se dessécher, ou bien on les enfouit dans le marc du raisin pendant plusieurs jours. Cette dernière préparation les rend forts & piquans.

CHAPITRE IV.

Des Fromages faits avec le lait de chèvres.

Ceux connus à Lyon, sous le nom de fromages du Mont-d’or, sont les plus renommés du royaume ; la manière de les préparer est simple, & on pourra l’imiter par-tout ailleurs en suivant le procédé que je vais décrire.

Commencez à traire les chèvres dès le matin : laissez reposer le lait deux ou trois heures, jetez de la présure dans ce lait pour le faire prendre à froid ; remuez avec une cuiller pour que la présure agisse sur toute la masse ; laissez reposer ce