Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1784, tome 5.djvu/149

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résiste davantage à la gelée, aux pluies & aux autres intempéries.

Cependant il y a quelques accidens dont on pourroit trouver dans les circonstances qui les accompagnent, les moyens d’en diminuer les effets, en usant de certaines précautions pour les empêcher d’exercer toute leur activité : par exemple, comme la rouille arrive assez ordinairement par un temps calme, on a imaginé de promener des cordages pour empêcher les brouillards prétendus d’y déposer ce qui forme cet accident ; sans doute que par le moyen de cette agitation on détermine la liqueur extravasée à s’étendre & à couler : il est d’ailleurs démontré que les secousses imprimées aux plantes par l’action des vents, leur sont quelquefois très-nécessaires ; elles facilitent la circulation de la sève, & sont, comme le remarque M. Toaldo, à l’égard des végétaux, ce qu’est l’exercice pour les animaux.

Quoique la pluie enlève très-visiblement les germes de la rouille, il seroit ridicule sans doute de proposer d’arroser les feuilles des grains qui en auroient éprouvé la mauvaise influence, parce que ce conseil ne conviendroit qu’à un particulier qui auroit un petit champ & suffisamment d’eau à sa disposition : mais M. de Chateauvieux prétend qu’en coupant les feuilles rouillées il en repoussera de nouvelles qui prospéreront mieux que si on ne faisoit ce retranchement ; ce moyen, il est vrai, ne peut être employé que dans le cas où la rouille attaqueroit ces blés en automne ou de bonne heure au printemps.

M. l’abbé Tessier, qui vient de publier un Traité des maladies des grains, & qui a adopté notre opinion sur la cause de la rouille, observe, que puisque les terres dans lesquelles on a rendu trop considérable l’engrais du partage, sont plus sujettes à cet accident que d’autres, on devroit laisser les troupeaux moins de temps dans chaque parc, ou lui donner plus d’étendue, ou y renfermer moins de bêtes à laine ; par cette attention, non-seulement on évitera la rouille dans les années où elle a lieu, mais on empêchera encore les grains de verser, inconvénient aussi fâcheux que la rouille. Il faut encore que les cultivateurs aient soin de ne pas faire couper les premiers, les fromens qui ont souffert de la rouille, afin que s’il vient à pleuvoir pendant la moisson, la paille soit lavée & que les grains en deviennent plus ronds.

Ne pourroit-on pas encore trouver dans la manière de recueillir le froment, les moyens de mettre ce grain à couvert de l’humidité, qui lui fait tant de tort, & empêcher que les pluies qui tombent pendant & après la moisson, ne pénètrent dans l’intérieur, n’affoiblissent les propriétés des parties constituantes, & ne leur donnent la disposition prochaine à germer & même à se gâter ? Ce moyen, bien simple, consiste à mettre le froment en petites meules sur le champ même où on l’a récolté, & aussitôt qu’il a été scié ; chaque meule doit avoir six à sept pieds d’élévation, & contenir cinquante à soixante gerbes. Mais quelqu’avantageuse que soit l’immersion du froment dans une eau de fumier & de lessive, employée ordinairement pour la préparation des semences, on est bien éloigné de