Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1784, tome 5.djvu/187

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ont observé que deux pintes de graines se sont échauffées presqu’au même point qu’un monceau considérable, & que ces grains ont conservé aussi longtemps leur chaleur. Le remuement ou la diminution du volume des monceaux, est donc une opération assez inutile, & si le blutoir m’a été de quelque secours, c’est qu’il a dépouillé le grain de toute ordure, d’un grand nombre de papillons, qui sans doute ne s’étoient pas accouplés, & qui n’avoient pas encore pondu ; peut-être encore par la diminution des œufs détachés par le frottement du grain l’un contre l’autre qu’il éprouve lorsqu’on le jette dans la trémie, qu’il tombe sur la grille (Fig. 5.) pour rouler ensuite tout le long de la grille inférieure B, (Fig. 2.) Les charançons produisent le même déchaussement s’ils font beaucoup multipliés ; mais cependant jamais aussi fort que celui causé par les fausses teignes.

Je crois que les vents du sud augmentent l’échauffement, parce qu’ils relâchent les pores des grains, que leur humidité y pénètre puisqu’ils s’enflent à cette époque. Le même effet a lieu sur les excrémens des insectes ; dès-lors il s’établit une fermentation qui réunissant sa chaleur à celle produite par les insectes, en augmente la masse commune. Le vent du nord, au contraire, dissipe l’humidité, rend les corps secs, en resserre les pores, & l’animal a peut-être moins de facilité à ronger & manger l’intérieur du grain, parce qu’il est plus sec. Ce qu’il y a de sûr, c’est qu’il éclôt moins de papillons par le vent du nord que par celui du midi.

La Figure 43 représente le charançon du blé vu très-en-grand ; A, l’animal dans son entier ; B, son antenne séparée ; C, la tête & les antennes ; D, sa patte.

CHAPITRE II.

Des causes intérieures du dépérissement des Grains.

Si l’on a été forcé par les circonstances, de moissonner avant que le grain ait acquis une maturité convenable, comme cela arrive parfois dans les pays du nord, il est clair que sa partie sucrée n’a pas encore été masquée ou convertie en substance farineuse. Dès-lors le grain est à peu près dans l’état, ou du moins approche de celui où il se trouve lors de sa germination. Il est par conséquent très-voisin de la fermentation, pour peu que les circonstances y concourent, l’humidité, par exemple ; ainsi ce grain renfermé humide fermentera dans le grenier, il s’y échauffera & s’y détériorera. Admettons que le grain y ait été porté dans un degré convenable de siccité & de maturité, la cause intérieure de l’échauffement n’en subsistera pas moins ; je veux dire la partie sucrée qu’il renferme, quoiqu’elle soit exactement masquée par la substance farineuse, & qu’on ne puisse dans cet état la reconnoître au goût. On a vu au mot Fermentation que les corps qui contiennent une portion sucrée, mucilagineuse, sont susceptibles de la fermentation vineuse, lorsqu’ils sont réunis en grande masse, & étendus dans un fluide convenable : or, si le blé est tenu dans un grenier naturellement ou pendant long-temps humide, le grain s’enfle à peu près