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trois bouillons pendant une minute ; retirez-le du feu, & y jetez le genièvre & les fruits cuits, pour verser le tout ensemble dans le tonneau par la bonde que vous fermerez bien pendant deux jours pour laisser infuser le tout. Après ce temps, vous verserez chaque jour un seau d’eau jusqu’à ce qu’il soit plein ; alors vous couvrirez simplement l’ouverture de la bonde sans la fermer hermétiquement, la liqueur fermentera ; quelques jours après elle bouillira, &, lorsqu’elle sera appaisée, vous pourrez vous en servir. À mesure qu’on tire du tonneau cette liqueur, on peut y ajouter de l’eau qui la perpétuera pendant plusieurs mois de suite.

M. Helvétius indique une méthode différente ; il double la dose de genièvre concassé, supprime l’orge & y substitue quatre poignées d’absinthe bien épluchée. Le tout jeté dans un tonneau plein d’eau, doit infuser dans un lieu frais ou dans une cave pendant un mois, pour devenir une boisson très-salutaire & plus durable, si on a soin d’y remettre autant d’eau chaque fois qu’on en retire de la liqueur.

Les baies contiennent une petite portion de mucilage sucré. De-là naît leur propriété fermentescible vineuse, puisque le seul mucilage sucré est susceptible de cette espèce de fermentation. (Voyez ce mot). D’après cette vérité aujourd’hui démontrée jusqu’à l’évidence, il est donc clair que, si l’on ajoute une substance sucrée à une autre substance qui l’est peu, comme la baie de genièvre, on augmentera sa vertu fermentescible vineuse, & on la rendra plus spiritueuse. C’est pourquoi l’auteur de la première méthode ajoute l’orge qui contient un principe sucré, & M. Helvétius double la dose des baies. Il vaut beaucoup mieux ajouter dix ou douze livres de miel commun, ou du sirop de mélasse, le tout bien délayé dans l’eau, & on aura après la fermentation, une liqueur beaucoup plus vineuse, spiritueuse & plus restaurante. L’augmentation de dépense est certainement de peu de valeur. Malgré l’addition que je propose, la liqueur ne se soutiendroit pas dans les chaleurs de l’été des pays chauds ; mais une telle ressource y devient inutile, attendu que le très-bon vin y est toujours à bas prix.

Dans les pays du nord, on distille beaucoup de graines, & l’eau-de-vie qu’on en retire a toujours un goût âcre, un goût de feu, &c. Pour les masquer, on ajoute des baies de genièvre à la liqueur qu’on veut distiller ; l’eau-de-vie en prend le goût, & on l’appelle eau-de-vie de genièvre.

Propriétés d’agrément. Le petit genévrier ou genévrier commun, peut servir à faire des haies, ou à garnir des massifs formés avec des plantes toujours vertes.

Il y a une variété de cette espèce de genévrier dont les rameaux sont droits, les feuilles plus larges & plus grandes que celles du premier, & que M. Tournefort appelle juniperus vulgaris arbor. Il est commun dans le nord & dans le midi de l’Europe ; son tronc est droit, son écorce rougeâtre, assez unie, quoique gercée ; ses branches latérales, grêles & tombantes. Ce port singulier lui mérite une place distinguée dans les bosquets d’hiver, où il figure d’une