Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1784, tome 5.djvu/355

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l’ombre, afin de les priver de l’eau surabondante de végétation qui leur reste, & les renfermer ensuite dans le grainier dans l’état de siccité. Il vaut beaucoup mieux suspendre à un clou chaque paquet d’herbe, & laisser une distance raisonnable entre chacun.

Quant aux graines qu’on est forcé de recueillir séparément, on fera très-bien de renfermer chaque espèce dans un sac étiqueté ; mais non pas suivant la coutume ordinaire des jardiniers, qui mettent les nouvelles graines sur les anciennes. Il vaut mieux avoir deux & même trois petits sacs de la même espèce, & l’année de chaque graine sera désignée sur l’étiquette, sauf à la changer au besoin. Combien d’accidens peuvent faire manquer des semis entiers ; combien d’accidens peuvent détruire les plantes que l’on conserve pour graines ! & on se voit alors, si on n’a pas eu la précaution que j’indique, forcé de recourir aux marchands de graines, qui achètent de toutes mains, & vendent, sans le vouloir, une espèce pour une autre, ou des graines si vieilles, si mauvaises, que malgré les soins assidus elle ne lèvent jamais. Un jardinier doit, relativement à ses graines, ressembler à un avare, & croire qu’il n’en aura jamais assez.

On espérera en vain avoir de bonnes graines à semer, si on ne leur laisse pas acquérir la plus parfaite maturité, excepté dans un très petit nombre de cas, ainsi qu’il a été dit. La nature, en nous fournissant des fruits, a plus songé à perpétuer l’espèce, qu’à satisfaire ou nos besoins ou notre sensualité. Cette partie charnue & succulente & délicieuse de la pêche, de la poire, &c. est nécessaire à la perfection de l’amande renfermée dans le noyau, ou qui forme le pépin. La chair fondante du melon, la substance vineuse du raisin ont le même but. Le brou de la noix, de l’amande, l’enveloppe de la noisette ne se dessèchent & ne se séparent que lorsque la partie ligneuse qui recouvre l’amande a acquis une solidité convenable, & ce bois devient à son tour le gardien & le conservateur de l’amande. Il en est ainsi de tous les fruits. Il résulte de ces faits, que lorsqu’un melon, une pêche, un abricot, &c sont au point d’être mangés, la graine, le noyau, &c. n’ont pas encore acquis le point convenable de maturité. Il faut laisser pourrir sur plante, les melons, les courges, & laisser les noyaux & graines renfermés dans des baies jusqu’à ce que la substance pulpeuse le détruise d’elle-même. Alors le but de la nature est rempli, & jusqu’à ce moment la graine reçoit la nourriture de son enveloppe.

On a coutume de renfermer le& graines dans des calebasses ou courges-bouteilles ouvertes par le haut, & suspendues par une ficelle à un clou. Je conviens que ce vaisseau a son mérite, puisqu’une fois sec, il faut des cas extraordinaires pour qu’il absorbe L’humidité de l’atmosphère ; mais les graines ne sont pas environnées par un courant d’air comme dans les petits sacs, & si elles n’ont pas été renfermées, bien sèches, l’humidité se concentre, la moisissure gagne, & la graine pourrit. L’usage des sacs est à préférer à tous les autres.

Les souris, les rats sont des