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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1784, tome 5.djvu/404

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Si on les cueille trop tôt, elles se rident, se dessèchent & se moisissent. Lorsqu’elles sont bien mûres, on coupe une portion de la branche qui les porte ; on unit plusieurs de ces branches ensemble avec leurs fruits, & on les suspend au plancher, en paquets de six à huit, ou avec de la filasse ou avec des osiers ; si le local est humide, peu aéré, leur écorce noircira & moisira. Avant de les fermer dans le grenier, elles doivent rester pendant quelques jours exposées au gros soleil, &, dès qu’il est couché, les rentrer dans l’appartement, pour les sortir le lendemain au soleil levant, & ainsi de suite. Lorsque les grenades sont grosses, belles, & qu’elles sont destinées à des envois, il vaut beaucoup mieux les suspendre une à une & les envelopper avec du papier ; cette petite précaution conserve la beauté de leur robe.

V. Propriétés médicinales. L’écorce du fruit, appelée dans les boutiques malicorium, a une saveur acerbe & austère, ainsi que les membranes qui séparent les grains. Elle est astringente, constipe, suspend la diarrhée séreuse, quelquefois diminue l’hémorragie utérine par pléthore ou par blessure, ainsi que les pertes blanches. Sa décoction déterge les ulcères de la bouche & raffermit les gencives… Le suc de la pulpe qui enveloppe les grains est doux dans certaine espèce, acide-doux & vineux dans une autre, très-acide dans la grenade des champs. Plus elles sont acides, plus elles sont astringentes & rafraîchissantes. La pulpe du fruit nourrit peu ; elle est agréable au goût & tempère la soif… Les fleurs, nommées balaustes, qu’elles soient doubles ou simples, sont astringentes.

On prescrit les balaustes, desséchées & pulvérisées, depuis demi drachme jusqu’à deux drachmes, incorporées avec un sirop… ; sèches & en infusion dans six onces d’eau, depuis deux drachmes jusqu’à une once… L’écorce sèche & pulvérisée comme les feuilles… Suc de grenades, dont les grains soient bien séparés de membranes jaunes qui les environnent, exprimé & clarifié, une livre ; faites-y fondre, au bain-marie, sucre blanc, deux livres moins trois onces, & vous aurez le sirop de grenades, qui se prescrit depuis une jusqu’à deux onces, en solution dans cinq onces d’eau.


GRENADILLE ou FLEUR DE LA PASSION. Toutes les espèces de ce genre de fleur, qui porte une physionomie bien singulière, sont étrangères à l’Europe, & y ont été transportées du nouveau monde. Tournefort les place dans la seconde section de la sixième classe, qui renferme les herbes à fleur en rose dont le pistil ou le calice devient un fruit à une seule loge, & les appelle grenadilla. Von-Linné les classe dans la gynandrie pentandrie, & les nomme passi-flora. Ce dernier en compte vingt-six espèces très-distinctes, les unes à feuilles très-entières, les autres divisées en deux ou trois lobes, & les dernières partagées en plus grand nombre de sous-divisions ; la grenadille dont nous avons à parler est de cette dernière ; il est inutile de décrire les autres, puisqu’elles ne peuvent, en général, subsister en France sans le secours de la serre chaude : d’ailleurs, elles appartiennent plus à