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Section première.

Des arbres ou arbustes non épineux, proposés pour exemple.

S’il ne s’agit que de se clorre, que d’empêcher les hommes & les animaux d’entrer dans nos possessions, il n’y a pas à balancer, les haies fruitières sont préférables à toutes les autres, puisqu’elles sont utiles & comme clôture & comme productives ; celles faites avec des arbres & des arbustes sans fruits mangeables, sont simplement des haies défensives, dont le feuillage de quelques-unes peut cependant servir de nourriture d’hiver aux bestiaux.

§. I. Des Haies fruitières.

J’appelle de ce nom, celles plantées en pommiers, poiriers, coignassiers, néfliers, sorbiers, pruniers & même abricotiers ; le pêcher & le cerisier me paroissent peu propres à cette destination. La gomme, la cloque, le blanc, épuisent trop promptement le premier, il n’est pas assez vigoureux pour se prêter à ce qu’on exigeroit de lui ; enfin, son éducation, confiée à des mains peu exercées, sera mauvaise, & sa courte existence dégoûtera bientôt de son emploi dans les haies. Le cerisier, quoique indigène à la France, a conservé un certain caractère sauvage qui lui fait supporter impatiemment la taille & les espèces de greffes que les haies demandent, & dont on parlera dans le Chapitre suivant.

Le noyer jouit du triple mérite de bien clorre, de donner du fruit & d’avoir des feuilles que les troupeaux respectent.

L’amandier fait de bonnes haies si on sait les conduire, & si on empêche le plant de s’élever perpendiculairement, & par conséquent de se dépouiller des petites branches par le bas.

Le noisetier, quoique très-facile à manier en apparence, ne l’est que par des soins assidus, parce qu’il pousse sans cesse des rejets de ses racines, & ses nouvelles tiges épuisent les anciennes, dès qu’elles sont parvenues à une certaine élévation, à moins qu’on ait eu l’attention ou de les supprimer, ou de les croiser avec les autres, & en cas de besoin de s’en servir pour les suppléer lors de leur caducité.

Le coignassier est un arbre excellent, il se prête à toutes les formes, & se garnit supérieurement.

Règle générale, en fait de fruits à noyaux, les pruniers de race vigoureuse, & qui se chargent naturellement de gros & bon bois, sont à préférer à tous les autres ; l’abricotier vient ensuite, surtout pour les provinces méridionales, ainsi que l’amandier ; tous arbres à fruits à pépins qui végètent avec force, sont utiles, & forment d’excellentes haies.

Il me semble voir la surprise de mon lecteur, & l’entendre critiquer ces assertions. Qu’il daigne ne pas me condamner sans m’entendre, & qu’il ne se hâte pas de prononcer avant que, des expériences bien faites l’aient mis dans le cas de juger avec connoissance de cause.

Deux objections assez plausibles se présentent naturellement contre de telles haies : elles seront broutées par les troupeaux, & on volera leurs fruits. Les troupeaux sont ou au propriétaire du champ, ou ils