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communiquent cette maladie petit à petit au tronc principal. Le cultivateur intelligent visitera ses haies après chaque tonte, & ne laissera ni chicots, (voyez ce mot) ni bois défectueux ou inutile. Pour des haies faut-il des soins assidus ? elles n’en exigent aucun, si on n’attache aucune importance à leur conservation & à leur durée. Elles en demandent beaucoup si la clôture est essentielle.

Le second défaut de la tonte en général est de laisser insensiblement gagner trop d’épaisseur à la haie, parce que si l’on se sert du croissant, des ciseaux, de la serpe, &c., on coupe, à peu de choses près, vers l’endroit où la première tonte a été faite ; & c’est multiplier les têtes de saule ou toupillonner, expression usitée dans les provinces. Il faut donc de temps à autre, par exemple, la troisième, cinquième ou septième tonte, qu’un ouvrier armé d’une petite hache ou d’une forte serpe, passe après le tondeur, & abatte ces têtes chiffonnes.

On ne doit pas conclure d’après ce qui a été dit, qu’il faille planter des arbres forestiers aussi près que l’aubepin, & celui-ci aussi éloigné que les arbres forestiers. La distance dépend de la force végétative de chaque espèce d’arbre. Cette loi prise dans sa généralité deviendroit abusive ; car un chêne blanc livré à lui-même a souvent 30, 40 & même 80 pieds de diamètre d’une extrémité de ses branches à une autre, & l’aubepin & le grenadier, par exemple, peuvent s’élever à plus de 20 pieds de hauteur. Ici la parité générale n’est point exacte, parce que tous les arbres en général sont dans un état forcé lorsqu’on les soumet à former une haie. La distance dans la plantation dépend encore de l’élévation qu’on veut donner à la haie, du terrain, du climat, &c. Ces considérations doivent avoir été apperçues par le cultivateur, & il est impossible de décrire ici toutes les acceptions particulières.

Les haies quelconques ont leurs apologistes comme leurs détracteurs, la raison en est que chaque écrivain a regardé le petit coin qu’il habite comme le royaume entier, & parce qu’il a conclu du petit au grand, soit pour, soit contre les haies. Les uns ont dit qu’il valoit mieux enclorre ses possessions d’un fossé large & profond, & que l’on perdoit moins de terrain… ; que les haies nuisoient par leur ombre, par leurs racines, & offroient un asile aux oiseaux, aux insectes, &c.

Je dis qu’un fossé de six pieds d’ouverture sur autant de hauteur, doit avoir deux pieds de largeur à sa base, & voilà une superficie au moins égale à celle occupée par les branches d’une haie, même dans l’année de la tonte. Les racines de cette haie ne s’étendent certainement pas horizontalement à trois pieds de chaque côté, surtout si on a conservé le pivot de chaque plant. Il y a donc autant de terrain perdu d’une manière que d’une autre ; mais il est dans l’ordre de la nature que les bords des fossés s’affaissent, & qu’à la seconde ou troisième année son ouverture primitive de six pieds s’étende jusqu’à 8, & le fond s’élève d’un à deux pieds. Celui qui veut nuire, peut donc le faire impunément, & le fossé devient défensif, seulement contre le bétail. Si on a des troupeaux, ses bords seront affaissés &