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premières années ; c’est le cas après cette époque, de couper la même tige un peu au-dessus du collet des racines ; la nouvelle prospère beaucoup mieux par la suite.

Si l’on considère la quantité de fruits ou faines que porte un beau hêtre, suivant les années, on sera très-étonné de ne pas voir un grand nombre de jeunes plants pousser au pied de cet arbre majestueux ; mais il faut observer qu’une multitude d’animaux vivent de son fruit pendant l’hiver ; que la semence ou amande à coque peu dure, enfouie dans les feuilles, y rancit & y pourrir promptement ; enfin, l’ombrage fort épais de l’arbre & peut-être la matière de sa transpiration, nuisent essentiellement à la végétation des plantes qui en sont couvertes. Je le répète, la seule bonne méthode de le multiplier, est le semis. Si on laisse le hêtre livré à lui-même, il se charge de branches & buissonne ; si on émonde ses branches, la plaie devient dangereuse ; le temps de l’émonder est à la chute des feuilles & de couvrir la plaie avec l’onguent de St. Fiacre, (voyez ce mot). Comment, dira-t-on, pour des forêts une opération si minutieuse ? eh oui ! parce que c’est plutôt un badinage qu’un travail, & une femme ou un enfant suffisent. Afin d’éviter que l’arbre buissonne, & pour l’obliger à donner une belle quille, il faut semer épais & éclaircir, ainsi qu’il est dit au mot Châtaignier, ou bien, les plus forts étouffent à la longue les plus foibles : si on les taille pendant ou après l’hiver, la cicatrice ne sera pas fermée lorsque la sève commencera à monter des racines aux branches ; dès lors écoulement & perte inutile de sève par la plaie, acrimonie de la sève extravasée, gouttière, excavation, pourriture, &c. L’onguent de S. Fiacre préviendra en grande partie, ce dérangement d’organisation, mais non pas en totalité. Le hêtre figure très-bien dans les bosquets, & on peut le conduire à la manière des charmilles ; ces dernières lui sont préférables à tous égards.


CHAPITRE II.

Du Hêtre, relativement à son fruit ou Faine.


Les cochons, les daims, & presque tous les quadrupèdes qu’on mène ou qui habitent les forêts, sont très-friands du faine. Cette amande engraisse très-bien les dindes ; mais le plus grand avantage qu’on peut & qu’on doit s’en procurer, c’est l’huile qu’on retire de ses semences. L’amande est agréable au goût, douce, cependant mêlée d’attraction, & cette striction tient plus à l’écorce qu’à l’amande ; ce principe réagit ensuite sur l’huile.

Il faut cueillir la faine à mesure qu’elle tombe, la porter dans un lieu exposé à un grand courant d’air & à l’ombre, ne point trop amonceler les fruits, afin qu’ils se dessèchent plus vite, & ne pas se presser de les porter au moulin pour moudre, parce qu’ils ne rendent beaucoup d’huile, que lorsque l’eau de végétation est en grande partie évaporée. Si on mout & presse l’amande fraîche, on aura beaucoup d’émulsion & peu d’huile.

Après la dessication convenable des amandes, on les nettoye de toute ordure, de tous corps étrangérs, & on choisit un jour passa-