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gagne le reste de la maison. Dans tous les cas d’incendie de cheminées, le meilleur parti à prendre est de retirer le bois & le charbon, les cendres au milieu de la chambre, à moins que le plancher ne soit en bois. Alors le courant d’air change en grande partie, il se dirige sur ce nouveau feu, & diminue d’autant celui de la cheminée. D’ailleurs, les émanations de feu, l’air fixe qu’il exhale, vicie l’air atmosphérique, & attiré ensuite par la cheminée, il éteint la flamme qui ne peut subsister dans l’air fixe. (Voyez ce mot). Il y a ici, comme on le voit, deux actions purement mécaniques : la première est la diminution du courant d’air moteur & soutien de la flamme dans la gaine de la cheminée ; la seconde, l’action directe de l’air fixe sur la flamme qui éteint le feu.

Si l’embrasement est considérable, ce premier moyen est insuffisant, sur-tout si on n’a pas la facilité de se procurer promptement de l’eau & en quantité suffisante ; car un peu d’eau sur un foyer très-animé, donne des ailes à la flamme & l’augmente. Toute personne qui craint le feu, devroit avoir chez soi une à deux livres de fleurs de soufre ; la dépense est médiocre, & la conservation facile. Aussitôt que l’incendie se manifeste, jetez sur le brasier qui couvre l’âtre de la cheminée quelques poignées éparses de fleurs de soufre, & bouchez le bas ou ouverture de la cheminée, avec une couverture de laine bien mouillée. D’abord, soustraction du courant d’air, point essentiel ; destruction de l’élasticité de l’air, par l’ignition du soufre, & sans élasticité dans l’air la flamme ne peut subsister. Si on présume que le brasier de l’âtre est encore trop ardent, quelques poignées de soufre jetées de nouveau, ralentiront son activité. On dira peut-être que la cessation de l’incendie tient à la masse d’air fixe produite par le soufre, je ne le crois pas ; mais que ce soit par une cause ou par une autre, peu importe, pourvu que l’opération réussisse. J’ai été deux fois dans des cas très-urgens de la mettre en pratique, & toujours avec le plus grand & le plus prompt succès.

On vient d’annoncer dans les papiers publics, qu’une certaine quantité d’oignons de cuisine, coupés par tranches, & jetée sur le brasier de l’âtre, produisoit le même effet. Comme je ne l’ai point éprouvé, je désire que la chose soit ainsi.

Jeter du sel de cuisine dans la cheminée après l’avoir bouchée, est un moyen qu’on ne doit pas négliger. Tirer des coups de fusil, agit encore très-bien si la gaine est bonne & solide. À tous je préfère le soufre, j’en ai l’expérience.

L’incendie des forêts est toujours la suite de quelque imprudence ou de la méchanceté ; mais voici un fait qui mérite de trouver ici sa place, & qui semble prouver qu’il peut y avoir des incendies spontanés, lorsque plusieurs circonstances y concourent.

Le 8 septembre 1774, dans la paroisse de Saint-Cyr-la-Lande, à trois lieues de Blaye, au territoire appelé Vergnottes, on s’aperçut, à la sortie de la messe, que le feu étoit dans le lieu des Vergnottes, & dans la partie plantée & semée en bois, d’environ 600 journaux.

On vit la fumée s’élever en colonne du milieu de la forêt, grossir