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la masse. Communément on entoure les cages avec une toile forte & à tissu lâche ; tel est le canevas, afin de laisser non-seulement un libre courant à l’air, & par conséquent à l’évaporation de l’humidité surabondante du fromage, mais encore afin de le garantir des mouches, des moucherons qui accourent de toutes parts, attirés par l’odeur acide qui s’exhale.

Les fromages mis à sécher sur la paille de la cage sont salés chaque jour, & chaque jour retournés, afin que la partie, qui étoit inférieure la veille, devienne la supérieure le lendemain, & soit salée à son tour. On répète cette opération jusqu’à ce que le fromage ait pris la juste quantité de sel qui lui convient : elle ne peut encore être déterminée que par l’expérience ou l’habitude journalière. Si on fait sécher trop vite les fromages, ils se gercent ; trop lentement ils moisissent.

Pour les affiner, on les porte dans la cave ou dans un lieu frais, mais non pas trop humide ; & après les avoir établis sur des planches bien nettes, on les frotte avec de l’huile, ou bien on les enveloppe avec de la lie de vin, ou avec un linge imbibé de vinaigre, &c. Si les fromages ont peu de volume, on les met dans un plat dont le fond est garni de feuilles d’orties ; on entoure le fromage avec de semblables feuilles, ou avec celles de cresson, & on recouvre ce plat par un autre. Il faut avoir l’attention de changer de temps à autre ces feuilles, & d’en remettre de nouvelles. Quelques-uns remplissent simplement le plat d’eau, y laissent le fromage pendant un, deux ou trois jours, le retirent ensuite, & le placent sur la paille dont les tablettes sont garnies.

Toute la théorie de la fabrication des fromages consiste à faire cailler le lait, séparer le petit lait, saler & affiner. Les détails dans lesquels nous allons entrer sur les manipulations des différens pays, éclairciront chaque point de la théorie.

Comme je ne me fuis jamais occupé de cette branche d’agriculture, j’aurai soin de citer les ouvrages dans lesquels j’ai copié ce qui me reste à dire.

CHAPITRE II.

Des Fromages de lait de Vache.

Section Première.

Fromages dont le lait est cuit.

J’emprunte du Dictionnaire Encyclopédique ce qui va être dit des fromages de Gruyères & d’Auvergne.

I. Fromage de Gruyères. Le territoire du même nom, situé dans le canton de Fribourg, en Suisse, & rempli de montagnes fort élevées, a donné le nom au fromage qu’on y fabrique, & qui sans contredit, mérite la préférence sur tous ceux faits avec le lait de vache. Les montagnes des Vosges, en Lorraine, la chaîne des Alpes de Franche-Comté, & du Dauphiné à la grande Chartreuse, fournissent des élévations & des pâturages analogues à ceux de Gruyères. On a adopté dans ces pays la méthode. Les fromages forment aujourd’hui une branche considérable de commerce pour la Lorraine & pour la Franche-Comté. L’Auteur de cet article, que je tire du Dictionnaire Encyclopédique, va parler.