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maine, il se met dans le cas de partager, & son attention, & ses travaux ?

Nous finirons ce qui a rapport aux prairies, par une circonstance qui peut ruiner un pré ; c’est lorsque le plantain y prend trop le dessus ; ses feuilles larges & serrées contre la terre, la couvrent entièrement, & empêchent les bonnes plantes de pousser, ce qui rend un pré tout-à-fait stérile ; le seul remède à employer dans pareille circonstance, c’est de labourer cette prairie, & après lui avoir fait porter du bled pendant quelques années, il faudra la remettre en pré.

Nous allons considérer à présent la manière dont notre judicieux cultivateur administre ses terres à bled.

Les terres de sa communauté sont, suivant l’usage général, assolées en tiers. Kliyoogg destine toujours la première sole pour le froment ou l’épautre, ce dernier grain est celui qu’il préfère pour l’ordinaire. La seconde sole est ensemencée en seigle, ou avoine, ou pois, ou fèves. La troisième sole reste en jachère ; les champs clos sont ensemencés toutes les années ; mais en outre, il a grande attention d’y varier les espèces de grains. Il fume ces champs deux fois en trois ans, & leur donne des soins tout particuliers.

Il compte pour labourer un arpent, la journée complette de deux hommes & de quatre bœufs.[1] Il donne, suivant l’usage ordinaire, trois labours à la première sole. Le premier, au printems ; le second, d’abord après la fenaison ; & le troisième, après la récolte ; il donne, autant qu’il lui est possible, deux labours à la seconde sole. Le premier, immédiatement après la récolte ; le second, immédiatement avant que d’ensemencer. On doit sur-tout observer de ne donner que de légers labours dans les terres légères, & d’en donner au contraire de très-profonds dans les terres pesantes & argileuses.

Kliyoogg a observé que pour se procurer d’abondantes récoltes, il est très-essentiel de varier souvent les espèces de grains dans le même terrein ; aussi marque-t’il le plus grand empressement lorsqu’on lui indique quelque nouvelle espèce de grains. Il est tellement convaincu de l’utilité de cette méthode, qu’il trouve un avantage sensible lorsqu’il achete seulement sa semence à quatre lieues de distance de chez lui.

Un des engrais dont il se sert avec beaucoup de succès pour fertiliser ses champs les plus stériles, de manière qu’ils portent d’abondantes récoltes en bled, est ce même sable ou petit gravier dont j’ai parlé rapidement au sujet des engrais pour les prés ; il mêle ce petit gravier avec la terre de ses champs. Le gravier dont il se sert est bleuâtre & marneux ; Kliyoogg le prend le long de quelques coteaux arides de son voisinage ; il a soin d’en ôter les gros cailloux.

Voici encore un nouveau genre d’amélioration que notre Kliyoogg emploie dans ses terres labourées. Ayant observé que les sillons destinés à l’écoulement des eaux enlevoient plusieurs toises de terrein qui devenoit par-là

  1. Nota. Ce calcul doit varier selon la qualité du terrein, & la facilité plus ou moins grande que procure la saison.