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celui des Aspres & de la plaine vit trois ans de plus, & demeure sain jusqu’à huit ans & au-delà. Le premier est sujet à la pourriture.

La toison du mouton des Aspres est fine, serrée, soyeuse, légère & douce au toucher ; les mèches sont courtes & frisées, d’un pouce à un pouce & demi de long ; elles allongent sans rien perdre de leur qualité quand la nourriture a été bonne.

Les belles toisons des Aspres & d’une partie de la Salangue surpassent en finesse les laines d’Espagne, dites Arragons, Garcies, Andalousie, & le cèdent peu aux Ségovies, lorsqu’elles sont pures & sans mélanges. On les vend dix à douze fols la livre en suint, & trente-six à quarante sols lavées elles ne sont pas d’un blanc parfait, elles tirent un peu sur le jaune, ce que les fabriquans regardent comme une perfection.

Une toison fine pèse trois livres & demi, & quelquefois quarte livres en surge, & cinq quarts étant lavée. Le Roussillon peut produire, année commune, huit mille quintaux surges de laine fine, & quatre mille d’inférieures.

Les troupeaux des gros tenanciers vont de dix-huit cens à deux mille bêtes, & ils les partagent en trois bandes égales. Pendant l’hiver un propriétaire de quatre cens bêtes les divise en trois lots, qu’il fait garder séparément. Après la tonte, on rassemble plusieurs troupeaux pour en composer un seul, lorsqu’on est sur le point de passer à la montagne.

Les pâturages artificiels des terres arrosables du Riveral, & des excellens fonds des Aspres, suffisent non-seulement pour les troupeaux de la plaine, mais encore pour ceux des montagnes pendant quatre mois & demi.

Les autres cantons du Roussillon sont le Valspir, le Conflant & Capsir, la Cerdagne.

Les moutons de Valspir tiennent beaucoup de ceux du Riveral & de la Salangue par le corsage & par la toison ; ils en diffèrent en ce que les derniers passent toute l’année dans leurs gras pâturages, au lieu que ceux du Vaspir vont pendant l’été à la montagne.

Le Conflant se divise en deux parties, le haut qui est montueux, & le bas qui est un pays de plaine, à peu près comme le Roussillon & le Valspir. Le Capsir est rempli de montagnes, de même que le haut Conflant.

Les propriétaires des troupeaux du bas Conflant imitent ceux de la plaine du Roussillon ; ils les gardent chez eux pendant l’hiver & une bonne partie du printemps ; aux premières chaleurs ils les conduisent à la montagne.

La branche du bas Conflant, quoiqu’inférieure à celle des Aspres, vaut mieux que celle du Valspir ; on y voit peu de toisons noires.

Les neiges abondantes qui commencent à tomber vers le mois de novembre, & qui couvrent pendant cinq ou six mois la surface des montagnes du haut Conflant & du Capsir, ne permettent pas aux habitans de conserver chez eux leurs troupeaux, ils vont tous les ans chercher ailleurs des asyles contre la rigueur de la saison qui les prive des pâturages.

Les ménagers du haut Conflant, après avoir donné pendant six mois l’hospitalité aux bergers des Aspres,