Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1785, tome 6.djvu/287

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espaliers & ses arbres, ils ne sont plus cachés sous les feuilles, mais ils courent par-dessus ou contre les branches. Il est donc facile de les prendre & de les tuer, ou de les jeter dans un sac, afin de les manger ensuite. Dans plusieurs de nos provinces, les limaçons sont un excellent mets pour les paysans, & dans d’autres ils ne mangent les limaçons que pendant l’hiver, lorsque leur coquille est fermée par l’opercule. On peut garder les limaces, & les donner aux poules, aux dindes, aux canards, qui en sont très friands. Le jardinier vigilant ira, chaque soir, une lumière à la main, visiter ses espaliers, les tables de son jardin, & ramasser tous les limaçons qu’il trouvera. À force de soins il parviendra à les détruire… Il peut encore, de distance en distance, placer des planches élevées d’un pouce, sur un côté, & touchant terre de l’autre ; les limaces & les limaçons s’y retireront, & ils les tuera : ce qui est plus sûr que les petits cornets faits avec des cartes, que les papiers publics ont, dans le temps, proposé comme une recette sûre. Je conviens que l’odeur de la colle qui unit les feuilles de papiers, dont la carte est composée, attire les limaçons, qu’ils la rongent avec plaisir, & qu’ils se cachent dans cette espèce d’entonnoir ; mais ce repaire n’est pas aussi sûr que celui offert par les planches, par les pierres, par les vases de terre, de fayance, à demi-cassés & renversés, &c. ; on les visite sans peine le matin & le soir.

Dans une seule nuit, les limaces sur-tout, dévastent les semis sur couche ou dans les tables, lorsque les plantes commencent à poindre. Si la limace est aveugle, comme on le dit, au moins elle n’est pas maladroite, car elle sçait très-bien choisir les herbes les plus tendres, & elle n’y manque jamais. Le seul moyen de préserver les semis, est de couvrir la terre avec des cendres, ou avec de la chaux pulvérisée, ou simplement avec du sable très-fin. Ces substances agissent mécaniquement sur l’animal, & non par quelques propriétés qui leur soient particulières. Ces particules fixes & déliées s’attachent au gluten de l’animal, empâtent tout le dessous de son ventre & ses côtés, de manière que ses mouvemens sont arrêtés, il ne peut plus se traîner en avant, & souvent il meurt sur la place. Mais si on laisse durcir cette couche de sable, de chaux, &c., elle ne produit plus aucun effet. Il faut donc de temps à autre la pulvériser, en diviser les molécules, la rendre le plus meuble possible, & même la renouveller au besoin.

Ces petits moyens suffisent dans un jardin, pour quelques tables seulement. Mais, y a-t-il beaucoup de cultivateurs en état de les employer en grand pour les vignes, pour les champs, &c. ?

Les limaces des jardins, jaunes, brunes ou noires, quelle que soit leur couleur, sont plus grosses, plus volumineuses que celles des champs : ces dernières n’ont que quelques lignes de diamètre, sur six, huit à dix de longueur, suivant leur âge. Elles sont communément de couleur grise, quelquefois verdâtres, & quelquefois une partie de leur corps est noire & l’autre grise. Ces couleurs tiennent-elles à leur degré d’accroissement, ou constituent-elle des espèces différentes ? Les naturalistes résoudront ce pro-