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sont assez rouies, on les retire de l’eau, & on les met en tas pendant trois jours, avec des planches par-dessus, pour achever le rouissement. Ensuite on les fait sécher, & on les prépare pour les mettre en filasse, comme le lin ordinaire, comme le chanvre. Si on ne veut pas faire rouir à l’eau, le rouissement s’exécute aussi bien au soleil ; il suffit de retourner de temps en temps les paquets comme ceux du chanvre.

Le fil & la toile qu’on retire du lin de Sibérie sont moins fins que ceux du lin ordinaire. Voilà en quoi il en diffère, & son seul côté désavantageux. Peut-être que si on le naturalisoit en France, le changement de climat, la nature du sol changeroient & amélioreroient sa texture. C’est à l’expérience à décider la question.


§. II. De la culture du lin ordinaire.

I. Du sol qui lui convient. Pour bien connoître la qualité de la terre nécessaire à cette culture, on doit distinguer non-seulement les climats, mais encore si on se propose d’avoir une graine bonne, & en quantité ; ou bien si l’on désire du lin haut en tige, & qui donne beaucoup de filasse ; ou enfin, si on veut se procurer du lin à tiges moyennes & à filasse fine.

Lorsque la graine est ce qu’on se propose sur-tout de recueillir, soit pour la vendre, comme les Hollandois, soit pour en extraire l’huile ; un sol un peu argilleux, bien substantiel, ou naturellement, ou par des engrais, & sur-tout bien préparés & emietté par des labours, donne une graine parfaite. Dans un semblable sol & avec des soins convenables, nous aurions en France de très-bonnes graines pour semer, sans être obligés d’avoir recours aux Hollandois, qui nous fournissent celle de la province de Zélande, & qu’ils vendent pour celle de Riga.

Plus la terre est légère, moins la tige s’élève, & plus la filasse est fine. L’époque des semailles contribue encore beaucoup à cette précieuse qualité, ainsi que nous le dirons tout-à-l’heure. Il ne faut pas que la terre conserve l’eau, ni qu’elle la laisse trop promptement filtrer. Ces deux extrêmes sont très à redouter, suivant les climats le premier, dans les provinces du nord ; & le second, dans celles du midi : le meilleur sol est celui qui retient une humidité convenable, & peu d’aquosité.

II. Des labours & des engrais. Dans quelque pays que ce soit, on ne sauroit trop les multiplier, ainsi que les engrais ; le point essentiel est de rendre la terre meuble, bien menuisée & sans motte, afin que la semence ne soit pas étouffée par-dessous, qu’elle germe, qu’elle lève & enfonce promptement sa racine pivotante.

Dans les provinces méridionales, où il pleut rarement pendant l’été, labourer la terre après la récolte des bleds, c’est la soulever avec peine & en gros morceaux : autant vaut-il la laisser telle qu’elle est ; mais, au contraire, si en septembre, ou dans les premiers jours d’octobre, il survient une pluie favorable, on doit alors labourer coup sur coup, jusqu’à ce que les molécules terreuses soient bien divisées, & prêtes à recevoir la semence. Les lins qu’on doit semer après l’hiver, laissent le temps & le choix des circons-