Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1785, tome 6.djvu/375

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les forcera à la reconnoître. D’après les faits cités, & depuis un temps immémorial, confirmés par l’exemple des troupeaux anglois & espagnols, qui n’entrent jamais dans la bergerie que pour y être tondus, je persiste à dire que le paccage est le moyen le plus sûr & le plus économique, quand on veut ranimer les forces d’une luzerne, & j’ajoute qu’on doit faire parquer à l’entrée de l’hiver, afin que les pluies ou les neiges de cette saison, aient le temps de délayer les crotins du mouton, & de pénétrer, chargés de leurs principes, jusqu’à une certaine profondeur du sol.

On objectera que pendant l’hiver, les troupeaux sont fréquemment conduits sur la luzernière, & qu’ils l’engraissent. Cela^est vrai jusqu’à un certain point. Mais, quelle différence n’y a-t-il pas entre la somme des urines & des crotins d’un troupeau qui a parqué pendant plusieurs nuits de suite à la même place, & celle d’un troupeau qui y passe rapidement, afin de chercher sa nourriture ? Personne de bon sens ne peut mettre en problême, laquelle des deux manières est la plus avantageuse.

M. Meyer proposa, en 1768, le gyps, ou plâtre, pour rajeunir les luzernes, & fit part à la Société économique de Berne, de diverses expériences qu’il avoir faites dans les années précédentes. M. Kirchberguer les a répétées avec soin ; & en voici le résultat sommaire.

1°. Il est démontré par ces expériences, qu’une mesure de gyps calciné, égale à celle de l’avoine, suffit pour la superficie de terre que la mesure d’avoine doit ensemencer.

2°. Que le gyps réussit mieux sur les bonnes terres en luzernière, que sur celles dont le sol est maigre & sabloneux.

3°. Qu’il produit un plus grand effet à la première qu’à la seconde année.

4°. Qu’il est moins actif dans un terrein humide, & qu’il lest davantage sur un sol sec.

5°. Si on répand le plâtre aussitôt après l’hiver, la première coupe se ressent de cet engrais. Si on attend après cette coupe pour le semer, la seconde en profite.

Je conviens, d’après ma propre expérience, que le plâtre est très-avantageux sur les luzernières qui commencent à dépérir ; qu’il favorise singulièrement la végétation du grand treffle (Voyez ce mot) ; qu’il est très-utile sur les prairies chargées de mousse ; mais peur-on employer le plâtre dans tous les climats, & seroit-il aussi avantageux ? La solution de ce problême tient à deux objets. Au prix du plâtre, & à la manière d’être de l’atmosphère dans le pays que l’on habite.

L’engrais du plâtre est moralement impossible à être employé dans plus de la moitié du royaume, à cause de son trop haut prix ; mais par-tout où il est commun & à bon compte, on fera très-bien de s’en servir. Cependant j’estime que la chaux éteinte à l’air, & réduite ainsi en poussière, mériteroit la préférence, & seroit bien supérieure au plâtre. L’une & l’autre de ces substances n’agissent que par leurs sels, & l’alkali de la chaux est en plus grande quantité, & plus développé que celui du plâtre ; dès-lors la combinaison savonneuse,