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dire, du moment que dans chaque canton on ne redoute plus les funestes effets du froid. Il n’y a donc aucun jour, aucun mois, qui fixent les semailles ; elles dépendent, & du canton, & des circonstances.

Il est avantageux de semer par tables de trois à quatre rangées de plans, & de laisser un petit sentier entre deux : ce moyen facilite l’enlèvement des herbes & le serfouissage de temps à autre. À mesure que la tige s’élève, le collet des racines se déchausse, & s’il survient une sécheresse, la plante souffre, au lieu qu’en serfouissant, ou labourant, comme il a été expliqué au mot Maïs, on ramène chaque fois la terre vers le pied, on chausse la plante, elle profite beaucoup, & elle craint moins la sécheresse. Si, au contraire, la saison est pluvieuse, ces espèces de petits fossés attirent & éloignent l’eau, & la plante n’est pas pourrie par une humidité surabondante.

La graine de ces millets, & surtout du panis, est très-petite, & il est difficile de ne semer que ce qu’il convient. On est dans l’habitude de mêler du sable avec la graine, afin que la main du semeur contienne moins de graines : cette précaution est peu utile. Personne n’ignore la manière de placer un drap ou un sac au-devant de lui ; il imprime, en marchant, à ce sac & à son contenu, un mouvement continuel. Le sable glisse entre les surfaces polies de la graine, & petit-à-petit gagne le fond ; de manière qu’en semant, une partie du champ est trop recouverte des graines, & l’autre ne l’est pas assez, & la dernière n’a presque que du sable. Il vaut mieux semer tout uniment à la volée, semer clair, & lorsque tous les grains auront germé, enlever les plans surnuméraires lorsqu’on arrachera les mauvaises herbes : c’est l’ouvrage des femmes & des enfans.

Comme la panicule de la seconde espèce de millet est trop grosse, trop longue, & trop pesante, proportion gardée avec sa tige, sur-tout si elle est agitée par le vent, ou chargée d’eau des pluies, il arrive souvent que cette tige plie, se corde, ou est entraînée sur le sol. Alors la maturité du grain devient incomplette, & toute la plante souffre. Afin de prévenir tout accident, on fera très-bien de ramer les plantes ainsi qu’il a été dit au mot Lin ; & au défaut de baguettes, du roseau des jardins, (Voyez ces mots) très-commodes pour cette opération, on se servira de petites perches de saule, ou du bois le plus commun dans le pays, & par conséquent le moins cher, suivant les circonstances. Cette précaution n’est pas à négliger pour la première espèce de millet, quoiqu’il en ait moins besoin que la seconde.

Le changement de couleur de la plante indique qu’elle approche de sa maturité, & qu’elle est mûre lorsque la tige, les feuilles & les panicules sont d’une belle couleur jaune paille. Si on attend une trop grande maturité, on perdra beaucoup de graines, & on infectera son champ pour l’année suivante. Quoique la récolte de ces millets soit mise au nombre de celle des petits grains, elle est cependant d’une grande ressource lorsque les saisons pluvieuses, les froids, &c. ont empêché de semer les bleds aux époques convenables, ou lorsque, par une cause quelconque, ils ont péri pendant