Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1785, tome 6.djvu/654

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les odeurs fortes, & mêmes vénéneuses, ont été mises à contribution. Il est certain que quelques-unes éloignent ces insectes ; par exemple, l’odeur de l’huile de laurier ; mais quel est l’homme qui pourra supporter cette odeur ? Les feuilles de sureau ont les mêmes propriétés, mais leur odeur entête, elle est nauséabonde, & ses émanations vicient l’air d’un appartement, & le convertissent en air fixe, (voyez ce mot) s’il reste fermé. On a beaucoup vanté du miel étendu sur une feuille de papier. L’expédient seroit admirable, puisque ce papier est bientôt couvert de mouches qui y demeurent attachées ; mais l’odeur du miel, du sucre, &c. les attire d’une très-grande distance. On propose de suspendre au plancher plusieurs petits fagots de branches de saule sur lesquelles les mouches se retirent pendant la nuit. Alors on détache doucement ces fagots, & on les secoue dans l’eau ou dans le feu… L’eau submerge la mouche, mais dès qu’on jette cette eau, dès que la mouche est frappée par le courant d’air, & réchauffée par le soleil, elle revient de sa léthargie. On peut, pour s’assurer du fait, faire une expérience assez singulière ; on noye quelques mouches, & avec du sel de cuisine, réduit en poudre très-fine, on les saupoudre légèrement, on les retire de l’eau, & on les porte ensuite au soleil. L’humidité de leur corps fait fondre le sel, l’évaporation de l’eau est augmentée, & l’insecte revient promptement à la vie, & comme par miracle.

On doit éviter avec soin d’avoir, dans la partie que l’on habite, des fruits, des viandes, des sucreries, &c. qui attirent les mouches, sur-tout lorsque le vent du sud règne, & que le temps est bas. Un moyen assez aisé pour en détruire une grande quantité, consiste à délayer, dans l’eau & dans une assiette de l’orpiment, dont les peintres se servent dans leurs couleurs, ou du réalgar. Les mouches viennent sur les bords de l’assiette, & trompées par cette boisson douce, mais perfide, elles s’empoisonnent, & vont tomber à quelques pas de-là. Ce procédé ne peut être mis en usage dans les chambres où l’on a laissé des enfans, à moins qu’on ne place le vase si haut qu’il leur soit impossible d’y atteindre. Leur indiscrète curiosité pourroit leur être aussi funeste qu’aux mouches… Il seroit encore très-imprudent de le mettre en pratique auprès des cuisines, des offices : outre le désagrément de trouver des mouches mortes dans tous les vases ; elles pourroient infecter les liqueurs ou les substances qu’elles contiennent… Un autre moyen est de fermer toutes les fenêtres d’une chambre, de n’y laisser aucun jour, & d’ouvrir ensuite la porte de communication avec la chambre voisine. Elles abandonneront le premier appartement pour se jeter dans le second qui sera éclairé par l’astre du jour, & ainsi de suite de chambres en chambres. Il faut convenir que ces petites ruses produisent leur effet, mais il est momentané si on r’ouvre la fenêtre pour donner de l’air, ou pour respirer le frais ; les mouches rentrent par centaines, & c’est toujours à recommencer.

Après avoir essayé tous les moyens proposés par différens auteurs, j’ai vu que je diminuais le nombre de ces insectes, mais que je ne pouvois détruire le mal par la racine. J’ai