Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/237

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Voilà, dira-t-on, beaucoup de soins pour un arbre qui doit ensuite être livré à lui-même, planté dans toutes sortes de terrains, &c. : j’en conviens, & quoiqu’ils ne soient pas bien considérables, & que dans une matinée ou une soirée un homme puisse couvrir plus de mille pieds, ces soins sont cependant nécessaires parce qu’il ne s’agit pas ici d’un arbre provenu de semence & déjà garni de racines pivotantes, & dont les bourgeons sont déjà ligneux ; mais il s’agit de boutures dont les racines sont foibles & les tiges délicates, herbacées : d’ailleurs, que sont trois ou quatre journées de plus, ajoutées aux frais d’une pépinière de mille à douze cents pieds ? Ces soins rigoureux ne s’étendent pas au-delà de la première ou de la seconde année, tout au plus.

Si les pousses après la première année sont bien établies, bien sûres, on n’en laissera qu’une ou deux, suivant leur force, afin que les surnuméraires ne dévorent ou ne partagent pas leur subsistance. La seconde est conservée sur pied, dans le cas que l’une ou l’autre vînt à périr par un accident quelconque ; mais des qu’il s’en trouve une bien assurée, la seconde devient inutile, & doit être supprimée au commencement ou à la fin de la seconde année. Si dans la première année les tiges restent confuses, foibles, imparfaites, il vaut mieux attendre la fin de la seconde pour procéder à la suppression des tiges surnuméraires. La force des sujets décide l’époque de la soustraction & du déplacement des tronçons voisins & inutiles. Sur cet objet toute règle trop générale est absurde.

On croit avancer beaucoup en élançant les tiges, en les élaguant des rameaux inférieurs : c’est de tous les abus le plus contraire aux règles de l’art, sur-tout à celles de la nature. On obtient, il est vrai, par ce procédé, & promptement, des tiges longues, minces, fluettes & hautes dès la seconde ou dès la troisième année ; mais il ne reste plus de proportion entre les rameaux qui naissent, & que l’on conserve à leur sommet, & la grosseur de la tige. Ils ont besoin de tuteurs, il faut raccourcir les branches du haut ; cependant le tronc n’en a pas moins filé, il reste sans force, épuisé, & il ne prend jamais une grosseur convenable. Qu’arrive-t-il enfin ; c’est que l’expédient le plus court & le meilleur est de le receper ensuite par le pied, afin de lui faire pousser une nouvelle tige qui acquiert la grosseur convenable, si elle est ménagée comme il convient.

J’ai dit qu’il falloit planter presque bout à bout les tronçons, soit des branches, soit des racines, & séparer les surnuméraires à la seconde ou à la troisième année, & même à la quatrième suivant le besoin, afin d’en faire de nouvelles pépinières. Les tiges qui s’élanceront des uns & des autres, se garniront inférieurement de rameaux qui agiront ici comme ceux des forêts, c’est-à-dire qu’ils s’étendront également, & que le brin s’élèvera en proportion ; enfin, qu’il ne filera pas, mais conservera la grosseur convenable. Si à la seconde ou troisième année on supprime ces tronçons, alors les sujets se trouveront espacés de trois pieds, & les rameaux inférieurs ne tarderont pas à se réunir & à occuper les places vides. Si on se hâte de les supprimer, les tiges s’élanceront & deviendront foibles. L’effet de ces rameaux infé-