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ainsi que le conseillent plusieurs écrivains, à moins qu’on ne soit pépiniériste, ou qu’on aime à brusquer tous les travaux. On doit laisser la distance de trois pieds en tous sens, d’un pied à l’autre.

Dans les pays méridionaux où le printemps est sec, il est très-prudent de planter la pépinière à la fin de novembre, si toutefois les feuilles sont déjà tombées du semis : ces plantations précoces donnent le temps à la terre de se tasser, de se serrer contre les racines, & aux fosses de bien s’imbiber des eaux pluviales. Comme les hivers y sont peu rigoureux, on n’aura rien à craindre des effets du froid. D’ailleurs un peu de paille, ou des balles de blé jetées sur les pieds, les garantira. Il résulte de cette plantation précoce, que les racines travaillent en terre, même dans la saison d’hiver, parce que les gelées ne pénètrent pas assez avant pour arrêter la végétation, & les arbres commencent à végéter quinze jours ou même un mois avant des arbres semblables, en février ou en mars. J’ai sous les yeux la preuve de ce que j’avance. On ne sauroit se figurer combien cette végétation accélérée, influe sur la longueur & la force de la tige qui se développe jusqu’à l’hiver suivant.

Dans des provinces du centre & du nord du royaume, il est possible de suivre la même méthode, puisque les grands froids ne commencent ordinairement qu’à Noël ou aux Rois ; ainsi, avec des précautions contre les gelées, & proportionnées à leur intensité, on gagneroit un temps bien précieux. J’oserois faire une question. Est-il bien démontré que les gelées fassent périr la pourrette réellement ligneuse, & non herbacée que l’on plante avant l’hiver ? Je ne le sais pas par expérience ; mais j’ai vu l’année dernière un pied de pourrette que j’oubliai, & qui resta hors de terre : depuis la fin de novembre jusqu’en février, quoiqu’il fût exposé au hâle, aux pluies, à des gelées de cinq degrés, il poussa très-bien après avoir été planté en février. J’oserois donc dire que le froid n’influe sensiblement sur les jeunes arbres que lorsque la lente végétation dans le semis, n’a pas permis à la substance de la pourrette de devenir ligneuse, c’est-à-dire qu’elle est encore herbacée & tendre.

En effet, le grand hiver de 1709 n’a fait aucun tort aux mûriers. Il en est donc de la pourrette comme du bourgeon qui a poussé sur le mûrier après la taille d’été, & qui est surpris par les gelées d’automne, parce qu’il n’est encore que dans l’état herbacé. Il seroit à propos, dans nos provinces du nord, de conserver les semis qui auroient mal réussi dans la première année, de les conserver pour une seconde, & de les planter en novembre de cette même année ; alors les pieds seroient véritablement ligneux, & ne craindroient pas la gelée. Lorsqu’on fixe la grosseur d’une plume pour exemple de celle que doit avoir la pourrette, c’est qu’alors, elle est assez ligneuse, & tout calibre en dessous est herbacé.

Je ne fixe, pour les provinces du nord, ni la fin de février, ni le commencement de mars, comme époque déterminée de la transplantation. Elle dépend de la manière d’être de l’année, & du climat que l’on habite. On doit replanter lorsqu’on est à peu près sûr que les grands froids sont passés.

Dans la Prusse & autres royaumes