Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/730

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feuilles, & ne pas leur donner le temps de durcir. La plante travaille tant qu’il ne gèle pas, & ses feuilles se conservent très-vertes & ne sont point endommagées par la neige, ou par la glace, à moins qu’elles ne soient encore trop tendres. Lorsque l’on veut en cueillir la graine, on ne coupe plus les feuilles depuis le mois de mars.

2, Grande culture. Ce fut environ en 1760 que MM. Wych & Rocques, en Angleterre, commencèrent a donner à la pimprenelle une sorte de célébrité comme fourrage. D’après ces premiers indices, un grand nombre d’écrivains ont célébré les avantages de cette plante, & plusieurs avec un enthousiasme qu’elle me mérite pas. Il convient de la réduire à sa valeur.

L’expérience a parfaitement démontré son utilité comme fourrage d’hiver, comme herbeuse, augmentant la quantité du lait des troupeaux, & la supériorité du beurre que l’on en retire. Après que le troupeau a parcouru le champ occupé par la pimprenelle, elle repousse de nouvelles feuilles, & sert plusieurs fois de pâturage depuis l’automne jusqu’au printemps, pourvu que le froid & la glace ne suspendent pas sa végétation ; la feuille conserve sa fraîcheur sous la neige, sans presque se détériorer. Voilà des avantages réels & bien précieux ; mais pour cela faut-il abandonner la culture du trèfle, des sainfoins, ainsi que plusieurs personnes l’on prétendu ? non, sans doute, ce seroit une faute impardonnable en agriculture.

Si l’on vouloit prendre la peine de réfléchie sur les objets que la nature nous présente, on verroit que la pimprenelle végète dans des lieux sablonneux, sur les rochers à scissures, où la terre se ramasse, parmi les pierres, &c. & que même dans les provinces du midi de la France, elle brave les chaleurs les plus fortes & les sécheresses les plus longues. Il est vrai qu’à cette époque la plante y paroit comme engourdie, ses feuilles rougissent, &c„ mais à la plus légère fraîcheur, après une petite pluie, elle végète avec beaucoup d’activité. Sa manière d’être indique donc les lieux qui lui conviennent. Il est vrai que si l’on transporte cette plante dans un bon sol & auparavant bien défoncé, elle prospérera & doublera ou triplera de volume. Tout cela ne prouve rien. Le point essentiel est de savoir par comparaison si le produit de ce bon champ semé en blé ou en trèfle ou luzerne, &c. ne sera pas plus considérable que s’il est semé en pimprenelle. Le plus grand enthousiaste ne peut donner la préférence à cette dernière. Que l’on suive à présent la même comparaison en dégradation de bonté intrinsèque des champs, & l’expérience apprendra que la pimprenelle doit être préférée dans ceux où le sainfoin ne réussit pas bien, soit à cause de la trop grande chaleur, soit à cause de la qualité du sol. Ceci demande encore une explication. Dans les provinces vraiment méridionales, de France, on ne fait qu’une seule coupe de sainfoin, & l’on pourroit en faire deux de pimprenelle, c’est-à-dire, au printemps & dans L’automne, & la pimprenelle fournira un pâturage d’hiver que ne donnera pas le sainfoin, car si an veut la con-