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Manière de tirer le goudron & le brai gras dans le Valais.

On abat, dans le courant de l’été, les pins qu’on destine à être brûlés pour en retirer le goudron. Les ouvriers savent la quantité qu’ils peuvent en employer, & ils règlent leurs coupes de façon, que dans le temps qu’ils chargent leurs fourneaux, le bois ne soit trop sec ni trop vert : car, pour bien faire, il ne doit être qu’à demi desséché… Comme toutes les parties du pin, savoir, le tronc, les branches, & même l’écorce, fournissent du goudron, on coupe les branches d’une longueur proportionnée à la grandeur des fourneaux, & l’on fend les gros troncs pour les réduire en buchettes comme des cotrets.

Dans le Valais, où la plupart des paysans entendent fort bien l’extraction du goudron, ils bâtissent leurs fourneaux avec de la terre à four & de la pierre, & ils donnent à ces fourneaux la figure d’un œuf posé sur son petit bout. Le fond est formé d’une seule ou de plusieurs pierres de taille exactement jointes. La pierre qui forme le fond du fourneau, est creusée de la même figure que l’intérieur de la coque d’un œuf. À l’un de ses côtés, il y a un trou d’un pouce & demi ou environ de diamètre, de six pouces de pente du dedans en dehors, & qui commence à cinq pouces du fond de la pierre : on ajuste à l’orifice extérieur, & à cinq ou six pouces plus haut que le fond du fourneau, un bout de canon de fusil de gros calibre, & on met une grande grille de fer sur le fond de ce fourneau qui est creusé en calotte.

On bâtit ces fourneaux de différentes grandeurs, selon la quantité de bois que l’on doit brûler : les plus grands ont dans œuvre environ dix pieds de hauteur sur cinq à six pieds de diamètre à la partie la plus large, qui est à la moitié de la hauteur, & de-là en diminuant jusque vers la bouche, où la partie supérieure du fourneau se trouve réduite à deux pieds & demi de diamètre : les parois ont environ un pied & demi d’épaisseur. Ces dimensions sont suffisantes pour donner une idée de ces fourneaux.

On construit en pierre de taille, le bas du fourneau, depuis la pierre creuse qui fait son premier établissement, jusqu’aux deux tiers de sa hauteur ; le reste s’achève avec du moellon & de la terre à four.

Quand ces fourneaux sont achevés, ils ont, tant au dehors qu’en dedans, la figure d’un œuf. On les laisse bien sécher, & l’on a soin de réparer les gerçures qui se font, soit au dedans, soit au dehors, avec la même terre qui a servi à les bâtir ; en sorte que quand ces fourneaux sont parfaits, ils paroissent très-proprement enduits de terre, tant à l’extérieur qu’à l’intérieur ; alors on les charge de bois, comme on va le dire.

On fait avec les petites bûches ou bâtons de cotrets, d’un pied & demi ou deux pieds de longueur, des faisceaux ou fagots, liés avec des harts de coudrier ou de viorne, & l’on proportionne la grosseur des fagots à l’ouverture du fourneau, car il faut qu’ils puissent y entrer facilement : on descend un de ces