Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1789, tome 8.djvu/389

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est assise sur une pente assez douce, dont le sol est bon, a de la profondeur, & que l’on peut arroser à volonté dans toute son étendue. La meilleure prairie, quant à l’exposition, est celle qui jouit des premiers rayons du soleil levant & un peu du midi ; après vient la prairie placée en plein midi ; celle qui regarde l’ouest lui est inférieure, & la prairie complètement tournée au nord est la plus mauvaise, soit par le peu de qualité de l’herbe, soit par les gelées blanches & réelles auxquelles elle est exposée, & qui contrarient beaucoup la végétation.

Les prairies de la plaine, toutes circonstances égales, donneront plus d’herbe que celles des coteaux, mais le fourrage en sera d’une qualité bien inférieure. L’herbe courte & fine des hautes montagnes nourrit mieux, & produit moins. La quantité & la qualité du fourrage dépendent donc 1°. de l’exposition ; 2°. du sol ; 3°. du genre d’irrigation ; 4°. de l’espèce ou des espèces d’herbes, qui sont la base de la prairie. Ces quatre objets sont susceptibles de grandes exceptions qu’il est impossible d’indiquer ici. C’est au propriétaire à les étudier & à agir d’après un examen très réfléchi.

On aura beau arroser une prairie placée sur un sol sablonneux, schisteux, graniteux, on n’aura jamais un fourrage de bien bonne qualité, quand même le soleil & l’eau auroient fait produire à ces fonds des herbes de la plus grande hauteur. Cette assertion est vraie dans sa plus grande rigueur. J’ai vu du bétail & des chevaux nourris à profusion avec ce fourrage, rester maigres, décharnés & sans force, parce qu’il contenoit peu ou presque point de principes nutritifs. Il y a plus ; le lait des vaches qui en étoient nourries, ne fournissoit pas un atome de crème ; cependant on auroit jugé au premier coup d’œil le foin excellent, car il étoit long, fin, & avoit conservé une jolie couleur. Celui qui achète du fourrage pour nourrir ses chevaux dans les villes, ne s’informe pas assez de quel pays, de quel tènement est celui qu’il achette. La ration en fourrage est fixée pour chaque cheval, sans faire attention qu’une telle quantité est plus que suffisante si l’herbe a la qualité requise ; tandis que la double ration du foin des prés dont il s’agit, lestera seulement l’estomac de l’animal sans le nourrir. Il résulte de ce peu d’attention, que les chevaux maigrissent, s’énervent, & l’on en cherche bien loin la cause tandis qu’elle est sous les yeux.

Le foin produit par une terre crayeuse, marneuse, plâtreuse & argileuse, est toujours de qualité inférieure, même en supposant ces fonds arrosés au besoin. Les principes salins y sont trop multipliés & n’y trouvent pas assez de substances graisseuses & huileuses, pour se combiner avec elles & constituer en proportions exactes les matériaux de la sève ; (consultez le mot Amendement) mais si de telles prairies sont tous les deux ou trois ans chargées d’engrais consommés, alors la combinaison aura lieu & leur produit acquerra de la qualité pendant tout le temps & dans la proportion que les principes combinés fourniront les matériaux de la charpente de