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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1789, tome 8.djvu/418

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pes troubler la végétation des plantes. Ménagez encore plus l’eau pendant les chaleurs de l’été, & ne la changez jamais au milieu du jour.

11e. Règle. L’eau pour abreuver la prairie doit couler & glisser sur la superficie du gazon, d’où elle s’insinue dans les racines pour les humecter & les rafraîchir. Jamais elle ne doit entrer par dessous le gazon & couler entre deux terres ; sinon elle sera bientôt embarrassée par les chevelus des racines, & arrêtée dans son cours, ce qui rendra le terrain marécageux, pour peu qu’il y soit disposé, quand même il auroit de la pente.

II. Quand doit-on arroser ? Ce qu’on appelle un arrosement avantageux dépend du climat.

Jusqu’à présent nous nous sommes occupés des soins qu’exige une prairie que l’on établit, il s’agit actuellement de lui donner des irrigations proportionnées à ses besoins.

On a dans les provinces méridionales semé son terrain à la fin & au commencement de septembre ; on est dès-lors bien assuré que la terre a eu le temps d’être tassée par les pluies d’hiver, & que l’herbe a eu la facilité de pousser & d’étendre ses racines jusqu’en janvier ; parce que la végétation y est rarement interrompue. Janvier & février sont les deux mois d’hiver, & encore la rigueur du froid capable de suspendre la végétation, ne dure pas plus de six à dix jours ; mais pendant tout le temps que règnent les vents du midi, d’est ou d’ouest, ainsi que les vents intermédiaires, ceux du nord exceptés, l’herbe végète sans cesse, & si la partie extérieure ne travaille pas beaucoup en raison du peu de chaleur de l’air ambiant, (voyez les belles expériences de M. Duhamel, rapportées à l’article Amandier) les racines ne cessent pas de s’alonger & de s’étendre ; de manière que l’on peut dire que pendant ces deux mois d’hiver, la sève ne cesse pas de travailler au moins en grande partie ; ainsi, d’une manière ou d’autre la prairie est en état de recevoir l’eau en mars si le besoin l’exige ; mais à coup sûr cette irrigation commencera à devenir indispensable en avril ; les exceptions sont très-rares.

Malgré ce qui vient d’être dit, la première irrigation ne doit pas être copieuse quoiqu’elle doive s’étendre sur toute la superficie de cette prairie, afin qu’elle ne tasse pas trop la terre, & que les racines, pendant les premiers jours du printemps, aient le temps de se garnir de beaucoup de chevelus.

Ce n’est pas le cas, pendant la première & la seconde année, de conduire les eaux de fumier sur la jeune prairie. Elle travaillera à merveille sans secours ; & dans la supposition qu’on ait beaucoup d’engrais & qu’on veuille l’en faire profiter dès la seconde ou la troisième année, & ainsi de suite, les eaux grasses & fécondes seront répandues à la fin de l’automne, afin que pendant l’hiver elles communiquent au sol de nouveaux principes de fécondité. Si on attend après l’hiver, cet engrais n’aura pas le temps de se combiner avec le sol, il poussera trop la végétation, & la récolte, toutes circonstances égales, ne sera pas si belle que celle du pré arrosé avec l’engrais avant l’hiver. L’action du