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mal qui a fait les blessures. Il faut, dit-il, faire une incision à un chien bien portant, la frotter avec la bave de l’animal mort ; & afin que le sang qui coule de cette incision ne nuise pas à l’objet qu’on se propose, il seroit convenable d’y mettre un morceau de charpie imbibée de la bave de l’animal suspect. S’il se passe des jours, & même une semaine, sans aucun symptôme de maladie, on peut conclure avec assurance, que l’animal suspecté n’étoit point enragé.

Cette expérience sans doute est très-décisive ; mais pour en obtenir le résultat, il faut attendre plusieurs jours, & le temps est précieux ; si le bétail a été mordu, la maladie se développe pendant cet intervalle, & parvient à un degré où tous les remèdes deviennent inefficaces.


Précautions à prendre.

Quoique toutes les maladies des chiens, que l’on confond sous le nom de rage, ne soient pas également dangereuses, il est toujours prudent d’y apporter des attentions. Dès qu’on s’aperçoit qu’un chien est malade, languissant, plus triste qu’à l’ordinaire, qu’il refuse de prendre les alimens, & grogne sans cesse contre les étrangers, il ne faut pas hésiter à l’enfermer ou à l’attacher : on lui présentera quelquefois de la boisson ; s’il la refuse, s’il entre en fureur, il faut redoubler d’attention, n’en approcher qu’avec précaution, ou le tuer sur le champ, sur-tout s’il n’a mordu personne. Mais si l’animal est échappé de la maison de son maître, si les autres chiens le fuyent en aboyant, s’il se jette en furieux sur tout ce qu’il rencontre, on ne peut plus douter du caractère de la maladie.

Des gens courageux & prudens, autorisés par la police des lieux, doivent s’armer d’un fusil, & le suivre jusqu’à ce qu’ils soient venus à bout de le tuer ; s’il a déjà mordu du bétail, & si on l’a saisi vivant, il faut l’enfermer avec soin ; car s’il est attaqué de la rage, il périra bientôt dans des convulsions, & on emploiera pour le bétail mordu, le traitement convenable ; si au contraire on l’a tué, on s’informera avec soin de tous les symptômes qu’il a éprouvés ; on comparera tous les signes, toutes les circonstances qui sont propres à éclairer sur la nature de cette maladie.

Enfin, il ne faut point abandonner à l’air le cadavre d’un animal enragé ; car, outre l’infection occasionnée par la pourriture, il est à craindre que des loups ou d’autres animaux affamés, en le mangeant, ne contractent la rage. Il est donc de la prudence de l’enterrer profondément.


Comment la Rage se communique.

Ordinairement, c’est par la morsure d’un chien, d’un loup, d’un chat enragé, que le bétail contracte cette cruelle maladie ; il est cependant d’autres voies d’infection, le contact seul de la bave sur la peau suffit pour communiquer la rage. Palmarius assure avoir vu des chevaux, des bœufs & des moutons, contracter la rage, pour avoir mangé de la litière sur laquelle avoient demeuré des cochons enragés.