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Si je prends une grosse rave, une carotte, une bette-rave, &c. si je les creuse un peu du côté de la racine & les suspends en cet état, par exemple, à un bras de cheminée, ces plantes pousseront des feuilles, de longues tiges, & de ces tiges sortiront des fleurs qui épanouiront. À cette époque, la végétation cessera & la rave pourrira.

Afin de donner une explication suffisante sur les exemples cités, il faut remonter à une cause antérieure, car l’eau n’a été ici que le véhicule qui a servi au développement des principes de la végétation des feuille ; & des fleurs ; ces principes séveux existoient déja tous formés, mais rapprochés dans la graine, dans le tronc, dans les bourgeons, dans les boutons à bois & à fruits. Ici, s’exécute un simple développement, & non une attraction d’une nouvelle sève, & non, son mouvement ascendant & descendant, sans presque aucune transpiration ni sécrétion. Développons ce principe, en suivant pas à pas la marche de la nature, depuis le premier printemps jusqu’à la chute des feuilles ; un cerisier bien formé va servir d’exemple.

Pendant l’hiver, il offre à la vue des branches chargées de boutons, petits, concentrés sur eux-mêmes, recouverts d’une enveloppe coriace & brune, composée de plusieurs écailles fortement collées en recouvrement les unes sur les autres, afin de garantir le germe de ces boutons, & du froid & de l’introduction de l’eau pluviale qui les feroit pourrir, & de cette eau glacée qui les anéantiroit. Ces boutons, si petits à l’œil, grossiront à l’approche des premières chaleurs, se développeront, & les uns produiront les nouveaux bourgeons, & les autres des feuilles & des fleurs.

Si à cette même époque d’hiver, on creuse la terre, on découvre les racines de cet arbre, on les trouve toutesaoutéts, c’est-à-dire, ligneuses, & recouvertes d’une écorce brune ; elles sont souples & entretenues dans cet état par une sève concentrée & gluante.

Pendant l’hiver, aucune fermentation n’a eu lieu dans le sein de la terre, aucune putréfaction réelle, aucune décomposition ni recomposition ; le froid s’y oppose, (consultez le mot amendement) les principes sont simplement étendus dans l’eau, comme le cinabre, dont il a été question dans le premier chapitre. Ce n’est qu’au renouvellement de la chaleur, ce n’est qu’à cette époque que la chaleur sublimera l’eau contenue dans la terre ; enfin, c’est alors qu’elle commencera à s’introduire par les tubes capillaires des racines, du tronc & des branches. En un mot, ce ne sera encore que de l’eau pure, & incapable de dissoudre la matière séveuse contenue dans toutes les parties de l’arbre, parce que l’activité n’est pas encore établie entre elles. L’écoulement copieux qui s’exécute sur le cep au premier printemps, ces pleurs abondans ne sont dans les premiers jours qu’une eau simple & à peine sapide. Cet exemple est une preuve sans réplique de ce que j’avance ; mais la chaleur une fois établie, les vraies combinaisons ont lieu dans le sein de la terre, son eau devient chargée de principes, & dissolvante de ceux qui existent dans les racines & dans l’arbre. Alors commence la véritable