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d’air peut les remettre, si la maladie a fait peu de progrès. Quant à ceux qui sont reconnus pour avoir réellement cette maladie, il n’y a d’autre expédient à prendre, que de les jeter dans le fumier, de les y enterrer, afin que les poules ne les mangent pas, ce qui pourroit les empoisonner.

Section III.

Des morts blancs ou tripés.

M. Rigaud de Lisle, habitant à Crest, est, je crois, le premier qui ait distingué cette maladie des autres. « Le ver, dit-il, étant mort, conserve son air de fraîcheur & de santé ; il faut le toucher pour reconnoître qu’il est mort. Alors on ne peut mieux le comparer qu’à une tripe ».

Cette sorte de mort subite, est causée par l’air fixe ou méphitique, & souvent elle est accélérée par la manière d’être de l’air atmosphérique extérieur. Si la chaleur est forte & soutenue, le temps bas & chargé d’électricité, toutes ces causes réunies, augmentent la première fermentation acide de la litière, & même des feuilles placées dans le dépôt, si elles sont accumulées les unes sur les autres. Alors l’abondance d’air méphitique émané de la litière, fait mourir subitement les vers.

Pour prévenir le mal, abandonnez toute espèce de fumigation, qu’on a très-grand tort de conseiller en pareil cas : tenez les fenêtres de l’atelier exactement fermées, excepté une ou deux qui seront ouvertes du côté du nord : ouvrez tous les soupiraux entre le plancher supérieur de l’atelier & l’étage au-dessus : enfin arrosez largement & à plusieurs reprises dans le jour, les carreaux avec de l’eau ; elle absorbera la sur-abondance de l’électricité atmosphérique de l’atelier. Voilà ce que pratiquent les laitières dans le temps des orages, afin d’empêcher le lait de tourner ; & ce moyen leur réussit. Je puis assurer, d’après l’expérience, que les vers ne seront point incommodés ni par l’air ni par l’eau. Ces précautions sont très-utiles dans les temps d’orage, où au moment de jouir de la plus belle récolte, on la perd dans un jour presqu’entièrement. Ces accidens sont fréquens dans nos provinces du midi. Ils le seront beaucoup moins en faisant usage du procédé que je viens d’indiquer.

L’air méphitique, n’est pas la seule cause de la mort prompte des vers ; l’électricité atmosphérique y contribue au moins autant, & de la même manière qu’elle concourt à faire tourner le lait, & à la prompte & étonnante putréfaction des corps animalisés, surtout du poisson de mer. Quoi qu’il en soit de cette opinion, voici un fait qui prouve la justesse de son application sur les vers à soie.

Une année je disposai des fils de fer, assez minces, le long des quatre tablettes réunies par leurs supports ; ces mêmes fils de fer furent prolongés sur toute la longueur des supports ; enfin, tous réunis par le bas & sur le carreau de la chambre, ils traversoient le mur & alloient se plonger dans une citerne pleine d’eau. Les autres tablettes de l’atelier, ne furent pas ainsi armées de conducteurs électriques. La saison fut, par fois, orageuse, cependant exempte de ces grandes chaleurs suffoquantes, qu’on éprouve quelquefois. La litière de toutes les tablettes de l’atelier,