Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1796, tome 9.djvu/701

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à la brisse ; alors leurs cocons seront minces, peu soyeux, ou, comme on dit, mal étoffès. Plus la brisse se prolonge, (cependant jusqu’à un certain point) meilleur est le cocon. Sa durée ordinaire doit être de six à sept jours, & au plus de huit. Or si la chaleur en diminue la durée, l’éducateur doit donc employer les moyens propres à la prolonger, afin que le ver ait le temps nécessaire pour préparer la matière soyeuse de son cocon. Dans ce cas il faut donner de l’air frais dans l’atelier, ce qui est très-facile, lorsqu’il est disposé tel que je l’ai décrit. Alors les vers mangeront plus long-temps, & leurs cocons seront meilleurs. Si la saison est trop chaude, & qu’on ne puisse pas rafraîchir l’atelier en ouvrant les portes ou les fenêtres, arrosez les planchers plusieurs fois dans la journée, &, ayez, dans l’atelier, plusieurs vaisseaux remplis d’eau. Il en résultera deux bons effets, 1°. l’eau absorbera l’air méphitique répandu dans l’atelier. 2°. La chaleur fera évaporer cette eau ; de cette évaporation produira une sensation de fraîcheur : d’ailleurs l’air sera moins sec & plus facile à respirer. Ces procédés bien simples préviendront la touffe, maladie commune dans les provinces les plus méridionales.

La touffe est occasionnée par l’excessive chaleur de l’air extérieur, qui vicie celui de l’atelier. Cela arrive principalement dans un temps bas, lourd & pesant : l’électricité dont l’air est surchargé, excite une prompte fermentation, soit dans les feuilles à demi-rongées, soit dans leurs débris, soit enfin dans les excrémens des vers ; il en résulte la putridité, & un méphitisme plus ou moins accéléré & plus ou moins funeste. La touffe est en raison de ces genres d’altération. Les personnes accoutumées à fréquenter les ateliers, distinguent aisément l’existence de cette maladie en y entrant. Il faut faire usage des moyens que je viens d’indiquer, & on peut y ajouter le procédé suivant. Dans un plat de terre bien vernissé, jetez une poignée de nitre ou salpêtre ; avec un charbon allumé mettez-y le feu. La déflagration du nitre donnera beaucoup d’air pur, qui corrigera celui de l’atmosphère & le rendra plus propre à être respiré. C’est dans ce cas sur-tout qu’on s’appercevra des bons effets des conducteurs électriques dont j’ai parlé. Les fumigations, les parfums brûlés, sont des procédés plus nuisibles qu’utiles. S’il en résulte quelques bons effets, c’est lorsque la fumée peut facilement être chassée par un courant d’air frais & pur. Dans ce cas, c’est le courant d’air qui corrige celui de l’atelier.

Voici une autre méthode qui réussit assez bien, mais elle est longue & fatigante : elle consiste à plonger, par poignée, les vers dans l’eau froide pendant quelques momens, & à les remettre ensuite sur les tables. M. Sauvages S’est convaincu par l’expérience, qu’un ver pouvoit demeurer pendant un quart-d’heure dans l’eau sans y périr : l’expérience a encore prouvé que des vers suffoqués par l’immersion, revenaient à la vie, en les soumettant simplement à l’impression d’un air frais. Les effets de la touffe sont rares. On reconnoît les vers qui en sont attaqués à la couleur de leur peau