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Les vins gras ne fournissent à la distillation qu’un peu d’eau-de-vie grasse, colorée, huileuse.

On corrige ce vice par plusieurs moyens :

1o . En exposant les bouteilles à l’air, et sur-tout dans un grenier bien aéré.

2o . En agitant la bouteille pendant un quart d’heure, et la débouchant ensuite, pour laisser s’échapper le gaz et l’écume.

3o . En collant les vins avec la colle de poisson, et les blancs d’œufs mêlés ensemble.

4o . En introduisant dans chaque bouteille une ou deux gouttes de jus de citron ou de tout autre acide.

Il est évident, d’après la nature des causes qui déterminent la graisse des vins, d’après les phénomènes que présente cette maladie, et les moyens qu’on emploie pour la guérir, que cette altération provient du principe extractif qui n’a pas été convenablement décomposé.

Nous voyons un effet semblable dans la bière, dans la décoction de la noix de galle, et dans plusieurs autres cas, où le principe extractif très-abondant se précipite de la liqueur qui le tenoit en dissolution, et acquiert les caractères de la fibre, à moins qu’une fermentation ne le brûle, ou qu’un acide ne le précipite,

L’acescence du vin est néanmoins la maladie la plus commune, on peut même dire la plus naturelle ; car elle est presque une suite de la fermentation spiritueuse. Mais, connoissant les causes qui la produisent, et les phénomènes qui l’accompagnent ou l’annoncent, on peut parvenir à la prévenir.

Les anciens admettoient trois causes principales de l’acidité des vins, 1o . L’humidité du vin ; 2o . l’inconstance ou les variations de l’air ; 3". les commotions.

Pour connoître exactement cette maladie, il faut rappeler quelques principes, qui seuls peuvent nous fournir des lumières à ce sujet.

1o . Les vins ne tournent jamais à l’aigre, tant que la fermentation spiritueuse n’est pas terminée, ou, en d’autres termes, tant que le principe sucré n’est pas pleinement décomposé. De-là l’avantage de mettre le vin en tonneaux, avant que tout le principe sucré ait disparu, parce qu’alors la fermentation spiritueuse se continue et se prolonge long-temps, et écarte tout ce qui pourroit préparer la décomposition acéteuse. De là, l’usage d’ajouter un peu de sucre dans la bouteille pour conserver le vin sans altération. De là enfin, la méthode très-générale de faire cuire une partie du moût à une chaleur lente et modérée, et d’en mêler dans les tonneaux qu’on veut embarquer. Dans quelques endroits d’Italie et d’Espagne, on fait cuire tout le moût ; et Bellon dit que les vins de Crète ne passeroient pas la mer, si on n’avoit pas la précaution de les faire bouillir.

2o . Les vins les moins spiritueux sont ceux qui aigrissent le plus vite. Nous savons par expérience que, lorsque la saison est pluvieuse, le raisin peu sucré, et l’alkool con-