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forte fermentation qui a été nécessaire pour développer l’esprit l’a éteint ou fait dissiper.

Cet arôme ne paroît pas susceptible d’être extrait pour être porté à volonté sur d’autres substances. Le feu même paroît le détruire ; car, à l’exception du premier liquide qui passe à la distillation, et qui conserve un peu de l’odeur particulière au vin, l’eau-de-vie qui vient ensuite n’a plus que les caractères qui lui appartiennent essentiellement.

6°. Le Principe colorant. Le principe colorant du vin existe dans la pellicule du raisin : lorsqu’on fait fermenter le moût sans le marc, le vin en est blanc. Ce principe colorant ne se dissout dans la vendange que lorsque l’alkool y est développé ; ce n’est qu’alors que le vin se colore ; et la couleur en est d’autant moins nourrie que la fermentation a été plus tumultueuse, ou qu’on a laissé cuver plus long-tems. Cependant la seule expression du raisin par un foulage fait avec soin peut mêler au moût une quantité suffisante de principe colorant pour faire prendre à la masse une couleur assez intense : et lorsqu’on a pour but d’obtenir du vin assez décoloré, on cueille le raisin à la rosée, et on foule le moins possible.

Le principe colorant se précipite en partie dans les tonneaux avec le tartre et la lie ; et, lorsque le vin est vieux il n’est pas rare de le voir se décolorer complettement : alors la couleur se dépose en pellicules sur les parois des vases on dans le fond : on voit comme des membranes nager dans le liquide et troubler la transparence de la liqueur.

Si l’on expose des bouteilles remplies de vin au soleil, quelques jours suffisent pour précipiter le principe colorant en larges pellicules.

Le vin ne perd ni son parfum ni ses qualités. J’ai fait souvent cette expérience sur des vins vieux très-colorés du Midi.

Il suffit de verser de l’eau de chaux en abondance sur le vin pour en précipiter le principe de la couleur. Dans ce cas, la chaux se combine avec l’acide malique et forme un sel qui paroît en flocons légers dans la liqueur. Ces flocons se déposent peu-à-peu et entraînent tout le principe colorant.

Le dépôt est noir ou blanc, selon la couleur du vin sur lequel on opère. Il arrive souvent que le vin est encore susceptible de précipiter malgré qu’il ait été complètement décoloré par un premier dépôt, ce qui prouve que le principe de la couleur a une très-forte affinité avec le malate de chaux. Le précipité coloré est insoluble dans l’eau froide et dans l’eau chaude. Ce liquide ne produit même aucun changement sur la couleur. L’alkool n’a presqu’aucune effet sur lui, seulement il y prend une légère teinte brune. L’acide nitrique dissout le principe colorant de ce précipité.

Lorsqu’on a réduit le vin à l’état d’extrait, l’alkool qu’on y passe dessus, se colore fortement de même que l’eau, quoique moins. Mais, outre le principe colorant qui se dissout alors, il y a encore