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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1800, tome 10.djvu/514

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année qu’il en fit usage, ils ne se contentèrent pas de se récrier contre cette innovation ; mais encore ils se plaignirent violemment. Un matin, il trouva sur un de ses champs un charriot que chargeoit son journalier, qui l’avoit emprunté pour tout le tems que dureroit la moisson. Le jour suivant, par une expérience qu’il fit, il mit fin à leur mécontentement : il leur dit que s’ils pouvoient lui démontrer la possibilité de transporter plus promptement avec un charriot qu’avec une charrette, le produit d’un arpent, il adopteroit sur le-champ, l’usage pour lequel ils étoient si portés, et qu’en outre, il les récompenseroit du tems qu’ils auroient perdu à faire cet essai ; mais aucun ne réclama ; et, depuis cette époque, jusqu’aujourd’hui, quoique chaque année il occupe de nouveaux ouvriers, aucun ne lui a adressé la moindre plainte contre ses charrettes, qu’il appliquée tous les services de sa ferme.

4°. De la conduite de la charrette. — On lui a objecté que la peine de conduire toutes ces charrettes, occasionnoit des embarras et des dépenses. Il ne soutient pas que les frais de conduite n’en soient pas plus considérables dans aucun cas ; mais, il dit que chez lui il n’en ressent pas d’augmentation. Le service qu’exige un charriot varie ; à cet égard, il a le même avantage. Souvent il a envoyé aux champs quatre charrettes avec deux hommes, autant avec un homme et deux enfans ; trois avec un homme et un enfant. Si donc il y a ici quelques différences, elles ne peuvent être que très-légères.

5°. Des accident qui surviennent. — Si l’une des roues d’un charriot casse, tout l’attelage se trouve arrêté, et il en résulte une longue perte de temps. Si, au contraire, cet accident arrive à une roue sur cinq ou six charrettes, la charge se répartit sur les autres, et la perte devient presqu’insensible.

6°. En considérant cette innovation de plus près, quelques personnes ont trouvé un défaut dans la largeur des jantes des roues, qui n’est que de deux ponces et demi, trois au plus ; mais elles sont dans l’erreur ; car si, pour un cheval, la largeur de la jante est de deux pouces et demi, il s’ensuivroit que pour huit, elle devroit être de vingt pouces ; or, elle n’est que de neuf pouces pour un charriot traîné par un tel attelage ; et quand même cette dernière largeur de neuf pouces existeroit pour les charriots à quatre chevaux, celles des jantes des roues de ces charrettes seroient encore proportionnellement plus fortes.

7°. La division de l’attelage, sans avoir égard à la voiture par elle-même, forme, suivant lui, l’avantage principal. Il a souvent, pendant ses voyages, causé avec des rouliers qui conduisoient des attelages de huit chevaux : les plus intelligens lui ont dit que toute l’habileté d’un conducteur consistoit à faire tirer tous ses chevaux avec une égale force. Mais il se trouve toujours un ou deux chevaux paresseux, non qu’ils se réservent pour s’employer avec plus